Anton Soliman

Le Grand Ski-Lift


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      Anton Soliman

      LE GRAND SKI-LIFT

      (l’espace de Zerbi)

      Anton Soliman

      Le grand Ski-lift

      Titre original: Il grande skilift. Traduction: Maïa Rosenberger

      Ce livre est une œuvre de fiction. Tous les noms, personnages, lieux ou organisations cités sont le fruit de l’imagination de l’auteur et ont pour seul objectif de participer à la véracité de l’intrigue. Toute analogie avec des faits avérés ou des personnes réelles, vivantes ou décédées, serait le fait du hasard.

      Le grand Ski-lift Copyright © 2018 Anton Soliman

      Première édition: Novembre 2013 Juin 2018 pour l’édition française Traduction: Maïa Rosenberger

      Ã‰diteur: Tektime - www.traduzionelibri.it

      email: [email protected]

      Tous droits réservés. Aucun extrait de cette publication ne peut en aucun cas être reproduit, y compris par quelque système mécanique ou électronique que ce soit, sans autorisation écrite préalable de l’éditeur, à l’exception de quelques brefs extraits, à des fins de compte-rendu.

      Le Grand Ski-lift : un gigantesque réseau de remontées mécaniques permettant aux skieurs d’évoluer dans un domaine qui couvre l’hémisphère boréal tout entier. Poussé par son besoin de renaissance, désirant oublier le Monde connu et les règles de la Tradition, Oskar Zerbi s’introduit illégalement dans ce circuit. Dans cette infinité de pistes et de sommets blancs, il est poursuivi par un mystérieux interlocuteur, et fait des rencontres étranges qui le renvoient aux bribes d’un passé oublié. Investi d’une dangereuse mission, il comprendra petit à petit la nature réelle de sa quête. Se dirigeant toujours vers le nord, il se réappropriera la connaissance de lui-même et de son passé, découvrant à quel point il est lié au Grand Ski-lift. Dans les terres désolées du Nord extrême, il accèdera enfin à la révélation ultime…

      Le point d'émersion

      Oskar Zerbi était arrivé au départ du Grand Ski-lift. Une gigantesque esplanade sans aucun bâtiment, mis à part une baraque en bois qui devait être la cabane des forfaits, et une autre construction inachevée, sans fenêtres. Des tiges de fer rouillées sortaient du toit. Des tas de neige sale, alourdis par une pluie fine, étaient amoncelés tout autour. De la montagne descendaient les bancs d'un brouillard épais que les faîtes d'une forêt de conifères s'étendant à perte de vue dans la vallée peinaient à retenir.

      Il descendit de voiture, mit un bonnet de laine pour se protéger du froid, puis tourna lentement sur lui-même, à la recherche d'un habitant à qui demander des renseignements. Mais l'endroit était désert.

      Les câbles d'acier qui supportaient les cabines du téléphérique sortaient de la baraque en bois. Il suivit du regard les pylônes de l'installation qui, comme une rangée de géants pétrifiés par l'hiver, montaient tout droit dans la montagne, disparaissant après quelques centaines de mètres, engloutis par le brouillard.

      Il se souvint alors de ce qu'on lui avait dit sur le Grand Ski-lift. Peut-être tout cela n'était-il qu'un quiproquo. Il se trouvait en fait dans un lieu abandonné, et cette installation ne servait probablement qu'à transporter le bois que l'on faisait en altitude pendant l'été. C'était étrange : c'était un ami, que l'on disait fiable, et passionné de montagne qui plus est, qui lui avait donné des informations sur le Grand Ski-lift. Il lui en avait parlé avec passion : des centaines de milliers de pistes sur les pentes de chaînes de montagnes ensevelies sous la neige, des lacs gelés, des forêts, des paysages alpins vierges... Il avait en somme évoqué un monde sublime dans lequel Oskar aurait pu passer ses vacances dans une liberté absolue. Et où il espérait pouvoir oublier bien des choses.

      Peut-être s’était-il trompé en chemin ? On lui avait pourtant clairement indiqué la route à prendre, avec des repères qu’il avait tous retrouvés sur son trajet. Il avait suivi les instructions de telle sorte qu’aucune erreur n’était possible. D’un autre côté, il pouvait penser à des informations déformées, mais il se dit que, dans ces circonstances particulières, il ne devait pas s’agir d’un simple malentendu.

      Â« Mais pourquoi s’étonner ? » se demanda-t-il enfin. Dans le fond, il n’avait jamais reçu de ses semblables que des informations imprécises sur les objets de ce monde ; des faits, et des lieux, évoqués de façon excessive par une multitude d’hommes dont l’égo tente de se maintenir à la surface de la Réalité comme un naufragé à la dérive.

      Ce n’était que le début de l’après-midi, mais il faisait déjà presque sombre. Oskar avait froid ; impossible de rester plus longtemps sur cette esplanade sans vie. La fatigue se faisait sentir : il s’était levé à l’aube et avait conduit tout ce temps avec une concentration extrême, car il s’agissait d’un voyage étrange … la traversée d’un territoire inconnu. Le tracé de l’autoroute 26 sud dessinait un demi-cercle vers l’ouest et contournait les montagnes juste au pied de la chaîne de la Sierra, en direction des grandes plaines. Ensuite, il avait suivi une route forestière pleine de nids de poule, au tracé sinueux, tout à fait inédit pour lui.

      Il avait déjà remarqué en d’autres occasions cette chaîne de montagne que l’autoroute longeait pendant des miles et des miles, mais il n’avait jamais eu la curiosité de s’arrêter. Il savait seulement que c’étaient des zones dépeuplées dans un territoire qui ne lui appartenait pas. Un espace fictionnel dans lequel il n’aurait rien retrouvé de familier : aucun programme à tenir, aucun point de repère. Il était tard, il devait trouver un hôtel pour la nuit. Il n’était pas prudent de rebrousser chemin dans une région inconnue.

      Le village était en aval de l’esplanade du téléphérique. Les premières maisons n’apparurent qu’après quelques virages : des constructions de pierre supportant des cheminées d’où sortait de la fumée. Quelques lumières étaient déjà allumées.

      Aux abords du village, un homme déchargeait du foin d’une charrette crasseuse pour l’entreposer dans une étable. C’était un vieux, petit et trapu, avec une veste de velours marron. Il se déplaçait avec lenteur, haletant sous l’effort.

      â€” Je suis désolé de vous importuner -dit Oskar avec une expression incongrue, en se penchant par la vitre de la portière passager- mais je voudrais savoir s’il y a un hôtel, ici.

      Le vieux le regarda attentivement, puis s’approcha calmement de la voiture.

       — Plus bas, vers la sortie du village, il y a un gars qui s’appelle Ignazio. Tu verras une porte verte, avec une lampe jaune. Je sais qu’il a des chambres.

      â€” Ah, d’accord, je vous remercie. Une porte verte avec une lampe jaune, répéta Oskar avec un accent approprié, pour montrer qu’il avait compris les indications.

      â€” C’est bien ça. Mais attention, souvent, il n’allume pas la lampe. Ce soir, elle sera même sûrement éteinte.

      Il roula au pas en regardant les portes, scrutant tout avec la plus grande attention, comme un chat qui entre dans un grenier sombre. Il traversa une petite place, avec un bar illuminé ; on entendait des voix rauques derrière les vitres embuées. Les gens de la vallée s’y retrouvaient peut-être pour jouer aux cartes.

      Ã€ la sortie du village, il découvrit l’hôtel sans difficultés : c’était une construction plus grande que les autres. On l’aurait dite sortie d’un livre pour enfants. Le bâtiment avait une apparence