que cette vidéo est publique ?” demanda-t-il.
“J’espère que non,” dit Maria, pensant clairement la même chose que lui. “Elle vient de la police de Springfield qui est…” Elle consulta à nouveau sa tablette. “Constituée de seulement cinq officiers. Nous allons faire ce que nous pouvons de notre côté, mais je doute qu’ils soient capables de garder ça caché.”
“Si ça sort, les gens vont paniquer,” dit Strickland.
“Exactement,” acquiesça Zéro en exprimant sa théorie à haute voix. “À La Havane, ils ont attaqué une zone remplie de touristes. Au Kansas, la route bondée d’une parade. Ce sont des zones pleines de monde qui apparaissent aléatoires. Peut-être qu’ils essaient de prouver que leur arme est juste un catalyseur et que les gens se causent tout autant de dommages les uns aux autres qu’ils ne le font avec leur arme.”
“Donc, après tout, ça pourrait être un message,” dit Strickland, toujours en train de marcher.
C’était la seule chose qui paraissait sensée pour le moment. Une attaque sur une ville si petite était une tentative de faire apparaître leurs cibles comme aléatoires afin de semer la panique et la confusion. “Mais si c’est le cas, que se passera-t-il s’ils utilisent ce truc à New York ? Ou Washington, DC ?”
Strickland s’arrêta de marcher. “Ils nous narguent presque. Ils nous disent que la prochaine cible pourrait être n’importe où, n’importe quand.”
“Jusqu’ici, les autorités locales ne savent pas ce qui s’est passé avec certitude,” annonça Maria. “On dirait qu’il n’y a que nous pour lier ça à l’attaque sonique de La Havane… pour l’instant.”
“Mais dès qu’ils le feront,” ajouta Zéro, “plus personne ne se sentira en sécurité.” Il imaginait déjà la scène : quelque chose d’aussi innocent que de marcher dans une rue fréquentée et d’être piégé par une détonation ultrasonique, sans savoir ce qui se passait, d’où elle venait, ou comment l’arrêter.
C’était une pensée terrifiante, même pour lui.
La tablette de Maria vibra soudain. Zéro regarda par-dessus son épaule et vit qu’il y avait un appel entrant sur le serveur crypté de la CIA. Mais au lieu d’afficher la source, il était simplement inscrit “SÉCURISÉ.”
Maria prit une profonde inspiration avant de répondre. C’était un appel vidéo et une femme brune impeccablement vêtue apparut soudain à l’écran, l’air solennel comme une statue.
“Madame la Directrice Adjointe,” dit la femme en guise de bonjour.
“Madame Halpern.”
Zéro ne reconnut pas le visage de cette femme, mais il connaissait son nom. Tabitha Halpern était la Chef de Cabinet du Président Rutledge à la Maison Blanche. Et il connaissait plutôt bien la pièce où elle se trouvait. Elle était assise en Salle de Crise, un endroit où il s’était déjà rendu à plusieurs reprises.
“Je suis avec le président,” dit Halpern. “Il aimerait vous dire un mot.” Elle tendit la main et fit pivoter l’écran jusqu’à ce qu’on voie apparaître Jonathan Rutledge, assis en bout de table. Il portait une chemise blanche avec les manches remontées jusqu’aux coudes, une cravate bleue mal serrée autour du cou, et une expression abattue sur le visage.
“Monsieur le Président,” dit Maria. “Je suis navrée que vous ayez à venir deux fois dans cette pièce durant la même journée.”
“Alors, vous avez vu ça ?” dit Rutledge en sautant les formalités d’usage.
“Oui, Monsieur, juste à l’instant.”
“Est-ce que c’est lui derrière vous ? Je veux lui parler.”
Zéro n’avait pas réalisé qu’il était partiellement dans l’angle de la caméra… Et s’il avait su qu’il ferait une visioconférence avec le président, il aurait enfilé quelque chose de plus présentable qu’un tee-shirt avec une veste légère. Maria lui passa la tablette et il la tint face à lui.
“Alors, c’est vous qu’on appelle Zéro,” dit simplement Rutledge.
“Oui, Monsieur le Président,” dit-il en hochant légèrement la tête. “C’est dommage que nous nous devions nous rencontrer dans de telles circonstances.”
“Très dommage, en effet.” Rutledge se frotta le menton. Il y avait quelque chose en lui qui semblait… eh bien, qui semblait tout sauf présidentiel pour Zéro. Il avait l’air perdu. Il avait l’air dépassé. “Avez-vous vu la vidéo de l’attaque, Agent ?”
“Oui, Monsieur, à l’instant. ‘Terrible’ est le premier mot qui me vient à l’esprit.”
“Terrible, oui.” Le président acquiesça, le regard vague et lointain. “Vous avez des enfants, Agent Zéro ?”
La question semblait bizarre, en particulier posée à un agent sous couverture dont l’identité était censée être confidentielle, mais Zéro lui répondit. “Oui, j’ai deux filles.”
“Moi aussi, quatorze et seize ans.” Rutledge posa ses coudes sur la table et finit par regarder Zéro dans les yeux, du mieux qu’il pouvait à travers la caméra. “J’ai besoin que vous retrouviez ces gens, que vous retrouviez cette arme et que vous mettiez un terme à tout ça. S’il vous plaît, ça ne peut pas se reproduire encore.”
Même dans des circonstances normales, ce qui était loin d’être le cas, Zéro n’aurait pas été capable de refuser un ordre du Président des États-Unis. Aussi, il n’avait pas besoin que Rutledge l’implore de prendre part aux opérations. Dès que Maria avait annoncé une attaque sur le sol américain, il avait déjà compris qu’il ne pourrait pas refuser. C’était codé dans son ADN. S’il y avait quoi que ce soit qu’il puisse faire, il le ferait.
“Je vais le faire.” Il tourna les yeux vers Strickland et corrigea sa phrase. “Nous allons le faire, Monsieur.”
“Bien. Et dites à Johansson de vous donner toutes les ressources dont vous avez besoin.”
Zéro fronça les sourcils en entendant ça. Une telle insistance dans cette phrase était étrange, surtout qu’elle était plus adressée à Maria qu’à lui.
“Bonne chance,” dit Rutledge, et il coupa brutalement la vidéo.
Zéro repassa la tablette à Maria, qui vérifia immédiatement s’il y avait eu de nouvelles informations sur ce qui s’était passé au Kansas.
Strickland soupira lourdement. “Il y a juste un problème. La Havane est une voie sans issue à présent. Et s’ils peuvent voyager aussi rapidement que ça, il n’y aura probablement rien non plus à trouver au Kansas. Nous en savons encore moins que tout à l’heure pour avancer.”
“Ce n’est pas totalement vrai.” Maria leva les yeux de la tablette. “Un témoin à Springfield, un vieux monsieur, a rapporté avoir croisé une femme dans la rue quelques minutes avant l’attaque : une femme blanche avec des cheveux roux flamboyants, tout comme à Cuba. Et cet homme affirme qu’il l’a entendu parler russe dans une radio.”
“Des russes ?” répéta Zéro. Il n’aurait pas dû être surpris, pas après tout ce qui s’était passé cette dernière année et demie. Mais les précédents complots avaient impliqué des cabales secrètes, de grosses sommes d’argent et des gens puissants. On n’aurait pas dit du tout le même mode opératoire, et il n’arrivait pas à concevoir le motif d’un tel type d’attaque, à part une sorte de vengeance.
“Quand bien même,” fit remarquer Strickland, “‘une russe rousse ne va pas forcément se retrouver facilement.”
“Tu as raison.” Maria sortit son téléphone mobile. “Mais je connais un truc qui peut nous aider.” Elle appuya sur un bouton et dit dans le téléphone, “Je descends. J’ai besoin de l’OMNI.”
“C’est