Елизавета Нарышкина

Мои воспоминания. Под властью трех царей


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не принимала по нездоровью, придворных балов совсем не было. Впрочем, эти обстоятельства совпадали с взглядами моей матери, не желавшей, чтобы мое вступление в свет ознаменовалось каким-то переломом в моей жизни. Она предупредила меня, что мое времяпрепровождение останется все то же, за исключением некоторых новых удовольствий, и что чем более я буду веселиться, тем строже я должна буду относиться к моим devoirs334. Я никогда не знала, когда меня повезут на вечер. Меня всюду приглашали, но мамá не принимала всех приглашений. Я часто тогда только узнавала, что меня ожидает выезд, когда я видела, как девушки расправляют мои незатейливые наряды, – все это моя мать делала, чтобы умерить мою любовь к свету и отвлечь мои мысли от суеты. Мне кажется, что получилось как раз обратное действие, потому что трудно себе представить, с каким трепетом я ожидала, повезут ли меня или нет. Во всяком случае, у нас не было места тем честолюбивым расчетам, с которыми связывается иногда появление девицы в свете.

      23 апреля мне неожиданно прислан был фрейлинский шифр335, но официально представление мое ко двору состоялось только осенью в Царском Селе, так как в конце апреля родился великий князь Сергей Александрович, а Императрица Александра Федоровна еще не возвратилась из-за границы. Весной мы, по обыкновению, провели несколько недель в Каменноостровском дворце, а потом переехали в Ораниенбаум. Там мне было особенно приятно. Мои впечатления тотчас же передадут живее картину нашего житья-бытья, чем мои рассказы a posteriori336, и потому я решаюсь переписать часть дневника моего, касающуюся этого лета.

      «Mercredi 26 Juin 1857. Hier soir à la Катальная, la grande-duchesse337 dit qu’il faudrait arranger quelque chose pour le retour du duc338, qui doit arriver samedi ou dimanche. On discuta des charades, des proverbes, des tableaux, rien ne fut décidé. Dеmain, le p[rin]ce Mestchersky ira en ville et en ramènera le c[om]te Fredro. C’est sur lui que nous fondons nos espérances.

      Vendredi 28 Juin. Ah! quelle journée décousue et accidentée – que celle d’aujourd’hui! Ce matin, après la promenade lorsque j’entrai dans le salon, je vis chez maman Fredro et Jean Rumine (ce dernier venu de Péterhof). On causa, on discuta des plans pour la surprise, que l’imagination du c[om]te Fredro produisit en abondance jusqu’au moment du déjeuner. Après, toute la sociéte se réunit de nouveau chez nous. On délibéra au milieu des rires et des saillies spirituelles du c[om]te Fredro, et le résultat fut le choix de trois mots qui doivent être présentés à dîner à la grande-duchesse. Première charade: Art-mai339, 2-de: Vers-vers340, 3-e: Vol-terre341. Ce plan à peu près fixé, on alla faire une promenade en deux calèches du coté de Венки. La première, celle de la grande-duchesse, contenait Hélène et moi dans le fond et le p[rin]ce Mestchersky avec Fredro sur le devant. Dans la seconde, la nôtre, il у avait maman342, Sacha et Rumine. La promenade fut très gaie. En rentrant, nous vimes arriver Boris343 inopinément du camp. Nous avons été engagés à dîner chez la grande-duchesse, mais maman, pour rester avec Boris, parvint à se dégager et m’y envoya seule. On parla de nouveau des charades, puis la grande-duchesse m’invita à rouler avec elle dans son ponney-chaise. Nous fimes une charmante promenade autour du lac, avant de rejoindre le reste de la société, qui s’était transportée pour le thé à la Катальная. Après le thé on écrivit une lettre collective en vers à la p[rince]sse Odoevsky. C’est Fredro, qui en a été le rédacteur. Pendant qu’elle se composait nous jouions aux syllabes, m-lle Strandman, Boris, m-r Numers et nous deux. Lorsque la lettre fut achevée la grande-duchesse nous appela pour en entendre la lecture. Les derniers vers en étaient:

      Et nous allons dater cette épitre amicale

      Des sommets fortunés de la Гора Katale.

      Nous apposâmes tous notre signature à cette missive, et on se sépara bientôt. La grande-duchesse me ramena en ponney-chaise. Le reste de la compagnie rentra à pied. Le duc arrive après-demain et nos charades sont pour samedi.

      Samedi 29 Juin. Aujourd’hui, jour de la Saint Pierre, nous avons eu la messe. Après le déjeuner, délibération chez nous. Fredro a admirablement lu des scènes de Molière. Puis, arrangements de nos costumes, avec m-lle Strandman. Ce n’est pas une petite affaire que d’improviser trois jolis costumes pompadour avec les éléments que nous avons à notre disposition. Nous dînâmes tous et Boris aussi chez la grande-duchesse. Après le dîner on se réunit dans une promenade en ligne. J’étais placée à côté de Fredro et sa conversation m’a surprise. Lui, si gai, si en train toujours, me parlait avec tristesse du poids des souvenirs, de l’amertume de la vie présente, dont on suit le cours au milieu des tombeaux de tant de personnes qui nous furent chères, lui parlait-on d’un autre côté, il ripostait vivement par une saillie remplie de verve pétillante, semblable à une fusée qui s’allume soudainement sur un ciel couvert de nuages. Cet esprit brillant, cette gaieté intarissable, ne sont-ils donc qu’un masque, au moyen duquel il dissimule la tristesse qui remplit son coeur? S’il en est ainsi, il est fort à plaindre. Nous prîmes le thé au palais. Boris, nous deux, Hélène et Jorry344, nous étions assis á la table des fruits et du laitage. Boris se mit à parler de mes soi-disant dispositions poétiques, et malgré tous mes efforts récita le malheureux: “Heureux jour de mon âge” qui fait mon tourment depuis l’âge de sept ans que je l’ai composé. Sacha amplifia et assura que je composais des vers jusqu’a présent, que j’en avais une masse. Hélène dit qu’elle le savait et elle et Jorry ajoutèrent qu’ils me les feraient réciter a la Кавалерская345. Par exemple! C’est