nous nous sommes éloignés l’un de l’autre. Il y a une grande différence d’âge entre nous, donc ça devait forcément arriver. Il baissa la voix et chuchota en aparté comme s’il révélait quelque chose de scandaleux. Elle n’a que deux ans de moins que ma mère.
Et sur ce, il se remit allègrement à couper ses courgettes.
Lacey se tenait là, complètement hébétée. Elle n’était au courant de précisément rien de tout cela. Tom n’était pas vraiment réservé au sujet de sa famille (bien qu’il ait du mal à parler de son père, qui était décédé quand il était jeune), et pourtant Lacey ignorait tout du fait qu’Heidi était la deuxième femme du père de Tom, et elle ne savait certainement rien de Norah, sa demi-sœur en-quelque-sorte-mais-pas-vraiment ! Aussi distante que soit la relation entre Tom et Norah, elle aurait certainement été abordée au moins une fois au cours de leur relation.
– Tu ne m’as jamais rien dit de tout ça avant, murmura Lacey. Elle se sentait inquiète.
Tom haussa juste les épaules.
– Oh, eh bien maintenant tu sais.
Il était typiquement désinvolte.
– Pas ‘oh, eh bien’, répliqua Lacey. Pourquoi est-ce que tu n’as jamais parlé de Norah avant ? Ou du premier mariage de ton père ? Pourquoi est-ce que je ne l’apprends que maintenant ?
Tom s’interrompit en plein geste. Il se tourna vers elle, ses sourcils marrons froncés dans un air interrogateur.
– Tu es stressée, n’est-ce pas ? dit-il en saisissant enfin son état émotionnel. Pourquoi cela t’inquiète-t-il autant ?
Lacey secoua la tête. Elle ne le comprenait pas complètement elle-même. Mais elle avait une vague idée…
– J’ai écrit une lettre à mon père, dit-elle.
Plusieurs secondes de silence passèrent.
Finalement, Tom écarquilla les yeux. Il posa maladroitement son couteau.
– Vraiment ? s’exclama-t-il. Tu as trouvé une adresse ?
Lacey acquiesça. Son cœur battait comme un marteau-piqueur.
– J’ai rencontré quelqu’un à la maison de vente aux enchères Sawyer & Sons qui le connaissait. Il avait une adresse. Il vit à Rye, dans le Sussex.
Alors que tout se mettait à sortir, Lacey sentit qu’un poids énorme lui était ôté des épaules. Elle n’avait pas réalisé à quel point son secret pesait sur elle. Elle se sentait idiote de l’avoir caché au départ.
– Lacey, c’est incroyable ! s’exclama Tom. On devrait y aller. Ensemble.
– Quoi ? dit Lacey, stupéfaite. Non. On ne peut pas faire ça.
– Pourquoi pas ? insista Tom. Tu sais enfin où vit ton père ! Après toutes ces recherches. Tu ne veux pas aller le voir ?
Lacey rechignait.
– Bien sûr, marmonna-t-elle. Son regard se posa sur le pied de son verre de vin qu’elle avait commencé à faire tourner nerveusement entre ses doigts. Mais il n’a pas répondu à ma lettre. Alors je ne sais pas s’il… tu sais… Sa voix tomba encore plus bas. … s’il veut me voir.
– Ah, dit Tom en devenant immédiatement sérieux.
Il la prit dans ses bras. Lacey accepta ce réconfort.
– Voilà une idée, dit-il. Pourquoi n’irions-nous pas ensemble ? Si on en faisait un week-end ?
– Pas question, dit Lacey en secouant la tête contre son torse. Ça m’a pris des semaines rien que pour lui écrire une lettre. Je ne suis pas vraiment prête à frapper à sa porte.
Tom la libéra de son étreinte.
– Et si on regardait sa maison de loin ?
– Non, dit plus fermement Lacey. Je suis désolée, Tom, mais je ne suis pas prête.
– Visiter la ville ? suggéra Tom. Le comté ?
Il s’éloignait de plus en plus et Lacey ne pouvait s’empêcher d’être touchée par ses efforts pour l’encourager, même s’il était un peu insistant à ce sujet.
– Je visiterai le comté, dit Lacey en cédant enfin. Je me sens assez à l’aise pour me rapprocher jusque-là. Pour l’instant.
Tom tapa triomphalement dans ses mains.
– Excellent ! Cela fait longtemps que nous aurions dû faire un voyage et il y a des tonnes de superbes villes balnéaires le long de la côte du Sussex. Et cette fois, ce sera juste nous deux, sans ta famille !
Il remua les sourcils en référence à sa dernière transgression.
Lacey gloussa.
– Tu en parles comme si ça allait se faire, dit-elle.
– Parce que ça va se faire, lui répondit Tom.
Lacey secoua la tête.
– On ne peut pas partir en voyage. On n’a pas de temps libre. On a tous les deux des tonnes de travail à faire, avec Halloween qui approche.
– Tu as raison, dit Tom. Puis il lui fit un sourire malicieux. À moins qu’on y aille demain ?
Maintenant, il délirait ! Ils ne pouvaient pas prendre la route spontanément. Ils avaient des commerces à faire tourner. Des employés à gérer. En plus, la dernière fois que Lacey avait fait quelque chose de spontané, elle avait fini par quitter son travail et déménager dans un autre pays !
– On ne peut pas partir demain, dit Lacey en secouant la tête.
Mais Tom ne cédait pas.
– Pourquoi pas ? Il suffit que nous préparions un sac et que nous prenions la route ! Explorons la côte du Sussex pendant quelques jours. J’ai Emmanuel à la pâtisserie et tu as Finnbar et Gina au magasin, il n’y a vraiment aucune raison de ne pas le faire.
Lacey hésitait. Peut-être que Tom avait raison. Ce week-end était leur dernière chance de s’échapper avant qu’ils ne soient à nouveau super occupés à préparer Halloween. Si elle ne le faisait pas maintenant, alors quand ?
– OK, lâcha-t-elle en se surprenant elle-même. Allons-y.
– Vraiment ? s’exclama Tom. Son sourire s’élargit jusqu’à être ce magnifique sourire éclatant qui avait fait tourner la tête de Lacey quelques mois auparavant.
– Oui. Vraiment, dit-elle. Faisons nos sacs et partons. Pourquoi pas ? L’excitation pétillait dans ses veines. Quel est le pire qui puisse arriver ?
CHAPITRE CINQ
– Voici le numéro de la société de sécurité, dit Lacey à Finnbar en montrant du doigt le tableau d’affichage dans son bureau. Il était recouvert de plusieurs couches superposées de post-its colorés. Si l’alarme se déclenche accidentellement, tu dois les appeler dans les trente secondes et leur donner ce code. Elle tapa sur le post-it rose. Sinon, ils vont penser que tu es un cambrioleur et je devrai payer des frais pour qu’ils réinitialisent le système. Compris ?
Finnbar leva les yeux de son carnet de notes.
– Compris.
C’était le matin après que Tom ait eu l’idée de partir spontanément en voiture et l’humeur de Lacey était passée d’une excitation grisante à une nervosité extrême à l’idée de laisser son magasin entre les mains de Gina l’écervelée et de Finnbar le maladroit. Heureusement, il n’avait pas fallu grand-chose pour convaincre Tom d’accepter de s’arrêter dans leurs magasins respectifs avant qu’ils ne prennent le large ; il savait qu’elle serait anxieuse tout le week-end sinon.
– Je pense que c’est tout, dit Lacey à Finnbar. À moins que tu ne penses à autre chose ? Tu sais que tu dois garder les