Бенджамин Франклин

Expériences et observations sur l'électricité faites à Philadelphie en Amérique


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parut l'étincelle, lui & l'homme placés au milieu de la longueur des fils de fer, ressentirent la commotion, sans qu'il fût jamais possible d'appercevoir le plus petit intervalle de tems entre l'étincelle & le coup, quoiqu'il eût été facile de discerner jusqu'à un quart de seconde s'il s'y étoit trouvé.

      Le même Physicien, pour acquérir une preuve encore plus complette de ce phénomène, fit quelque tems après une autre expérience un peu différente, dont le succès lui confirma celui de la précédente. Ayant choisi un endroit commode dans une plaine des environs de Paris, il l'entoura d'un fil de fer de quatre mille toises de longueur qui font deux lieuës. Les deux extrémités de ce fil furent disposées à six ou sept pieds de distance l'une de l'autre. Pendant que M. le Monnier tenoit dans sa main l'un des bouts de ce fil de fer, un autre observateur qui portoit la bouteille électrique approcha le fil-d'archal de cette bouteille de l'autre bout du fil de fer. Dans le même instant les deux observateurs ressentirent la commotion dans les bras dont ils tenoient l'un le fil de fer & l'autre la bouteille. La commotion est moins forte dans cette expérience qu'elle ne l'est dans la précédente, parce que sa violence est partagée entre les deux observateurs; chacun n'éprouve qu'environ la moitié de la commotion qu'il ressentiroit, si le cercle de communication de l'un à l'autre étoit achevé; mais le résultat n'en est pas moins sûr pour le but qu'on s'étoit proposé. L'expérience fut répétée, & le même effet s'ensuivit toujours également, sans qu'on pût trouver le moindre instant saisissable entre l'apparition de l'étincelle & la sensation du choc. Ainsi l'électricité parcourut une espace de deux lieuës dans un instant imperceptible. On ne remarqua pas non plus la moindre différence de force entre la commotion qui se fit sentir à l'un des observateurs & celle qui se fit sentir à l'autre, quoiqu'ils ne se communiquassent que par le fil de fer de quatre mille toises de longueur.

      Il arrive souvent, lorsqu'on électrise la bouteille avec excès, ou qu'on la soutient par le fond étant trop fortement électrisée, qu'elle se décharge d'elle-même dans la main de celui qui la tient, sans qu'il approche son autre main du fil de fer de cette bouteille, ni du premier conducteur. Il sort alors une forte étincelle du fond de la bouteille, & il se fait une puissante commotion. Il est arrivé à plusieurs de recevoir de cette manière un choc si violent qu'ils en ont été renversés, & qu'il leur en est resté dans toutes les parties du corps un tremblement qui a duré trois ou quatre jours. Ils ont aussi ressenti pendant long-tems l'impression que la violence de l'étincelle leur avoit faite au doigt, & en ont porté long-tems temps une marque noire semblable à celle d'une brûlure.

      Il arrive encore quelquefois qu'en chargeant la bouteille auprès du globe, elle fait explosion & se casse; celui qui la tient reçoit dans cet instant une violente commotion: après cette explosion la bouteille se trouve percée au côté d'un trou exactement rond ordinairement sans fêlure, dont on est averti par l'écoulement de l'eau qu'elle contenoit. Il est aussi arrivé plus d'une fois que le globe lui-même a fait explosion & s'est brisé en même tems que la bouteille; quelques-uns de ses fragmens ont paru avoir été lancés avec autant de force que des éclats de bombe. Il est plus sûr de ne charger la bouteille qu'auprès du premier conducteur.

      Si un homme est si rudement frappé d'un coup d'électricité qu'il puisse même en être renversé, & en ressentir les effets pendant plusieurs jours, doit-on s'étonner que de petits animaux puissent en être tués? Presque tous ceux qui ont répété l'expérience de Leyde, en ont fait l'épreuve avec succès.

      La médecine à sçu plusieurs fois tirer parti des choses qui sembloient les plus opposées à son but, & convertir en remèdes salutaires des substances qui avoient de tout tems été reconnuës pour des poisons dangereux; la philosophie à son exemple a essayé de faire servir à l'utilité des hommes ce qui peut leur être nuisible ou qui paroît tout au moins inutile pour la santé: elle a tenté d'appliquer à la guérison des maladies, ce qui peut donner la mort. Quel but plus noble les Sciences peuvent-elles se proposer? l'extrait d'une lettre de M. Jallabert célèbre Professeur de Philosophie à Genève inséré dans le Journal des Sçavans pour le mois de Mai 1748. fait foi du dessein, de l'épreuve & du succès.

      »On m'amena, dit M. Jallabert, le 26. Décembre un nommé Nogués paralytique du bras droit depuis près de quinze ans; outre la perte du sentiment & du mouvement, le bras & l'avant-bras étoient extrêmement maigres. Nous exposâmes d'abord, Mr. Guiot Chirurgien & moi à l'épreuve de la commotion, la main paralytique attaché au vase; la violence du coup porta principalement au haut de l'épaule. Je fis ensuite découvrir le bras paralytique, & l'homme étant placé sur de la poix, & vivement électrisé, je vis sortir des étincelles de divers endroits du bras; nous aperçûmes d'abord que les muscles d'où elles partoient, étoient agités de mouvemens convulsifs: bientôt après nous les vîmes mouvoir successivement & en différens sens l'avant-bras, le carpe & les doigts, suivant que nous tirions l'étincelle de tel ou tel muscle.»

      »Je me mis à la place du paralytique, & j'observai que les muscles & les parties auxquelles ils aboutissent se mouvoient quand on en tiroit une étincelle, sans qu'il fût en mon pouvoir de l'empêcher, & que suivant que l'on tiroit une étincelle, par exemple, des muscles extenseurs ou fléchisseurs du carpe ou des doigts, ils se baissoient ou s'élevoient en sens opposés. Cette observation me donna quelqu'espérance pour - le paralytique, & après l'avoir souvent exposé aux étincelles électriques & quelquefois à la commotion, je remarquai des changemens en bien, & le 10. Janvier le bras paralytique avoit repris beaucoup d'embonpoint, le malade commençoit à étendre les doigts. Le 24. Janvier les mouvemens de l'avant-bras & du bras se faisoient mieux, il approchoit la main de son chapeau. Le 30. Janvier il avoit tiré son chapeau; l'avant-bras affecté étoit aussi rempli de chair que l'avant bras sain, & le bras augmentoit considérablement; le poignet pouvoit faire les différens mouvemens, lors même que la main étoit chargée d'une bouteille tenant un pinte.» Une lettre de Genève du 28. Février porte que le paralytique tiroit son chapeau sans peine, qu'il manioit de gros marteaux, & qu'il comptoit pouvoir forger en peu de jours.