Морис Леблан

Les Aventures d'Arsène Lupin (La collection complète)


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hocha la tête :

      – Dites donc, Herlock, nous qui nous flattions de travailler incognito ! Je ne serais pas étonné que la garde républicaine nous attendît rue Murillo, et qu’il y eût réception officielle, avec toasts et champagne.

      – Quand vous vous mettez à avoir de l’esprit, Wilson, vous en valez deux, grinça Sholmès.

      Il s’avança vers l’un de ces hommes avec l’intention très nette de le prendre entre ses mains puissantes et de le réduire en miettes, lui et son placard. La foule cependant s’attroupait autour des affiches. On plaisantait et l’on riait.

      Réprimant un furieux accès de rage, il dit à l’homme :

      – Quand vous a-t-on embauchés ?

      – Ce matin.

      – Vous avez commencé votre promenade ?…

      – Il y a une heure.

      – Mais les affiches étaient prêtes ?

      – Ah ! Dame, oui… lorsque nous sommes venus ce matin à l’agence, elles étaient là.

      Ainsi donc, Arsène Lupin avait prévu que lui, Sholmès, accepterait la bataille. Bien plus, la lettre écrite par Lupin prouvait qu’il désirait cette bataille, et qu’il entrait dans ses plans de se mesurer une fois de plus avec son rival. Pourquoi ? Quel motif le poussait à recommencer la lutte ?

      Herlock eut une seconde d’hésitation. Il fallait vraiment que Lupin fût bien sûr de la victoire pour montrer tant d’insolence, et n’était-ce pas tomber dans le piège que d’accourir ainsi au premier appel ?

      – Allons-y, Wilson. Cocher, 18, rue Murillo, s’écria-t-il en un réveil d’énergie.

      Et les veines gonflées, les poings serrés comme s’il allait se livrer à un assaut de boxe, il sauta dans une voiture.

      La rue Murillo est bordée de luxueux hôtels particuliers dont la façade postérieure a vue sur le parc Monceau. Une des plus belles parmi ces demeures s’élève au numéro 18, et le Baron d’Imblevalle, qui l’habite avec sa femme et ses enfants, l’a meublée de la façon la plus somptueuse, en artiste et en millionnaire. Une cour d’honneur précède l’hôtel, et des communs le bordent à droite et à gauche. En arrière, un jardin mêle les branches de ses arbres aux arbres du parc.

      Après avoir sonné, les deux Anglais franchirent la cour et furent reçus par un valet de pied qui les conduisit dans un petit salon situé sur l’autre façade.

      Ils s’assirent et inspectèrent d’un coup d’œil rapide les objets précieux qui encombraient ce boudoir.

      – De jolies choses, murmura Wilson, du goût et de la fantaisie… on peut déduire que ceux qui ont eu le loisir de dénicher ces objets sont des gens d’un certain âge… cinquante ans peut-être…

      Il n’acheva pas. La porte s’était ouverte, et M. d’Imblevalle entrait, suivi de sa femme.

      Contrairement aux déductions de Wilson, ils étaient tous deux jeunes, de tournure élégante, et très vifs d’allure et de paroles. Tous deux ils se confondirent en remerciements.

      – C’est trop gentil à vous ! Un pareil dérangement ! Nous sommes presque heureux de l’ennui qui nous arrive, puisque cela nous procure le plaisir…

      « Quels charmeurs que ces Français ! » pensa Wilson qu’une observation profonde n’effrayait pas.

      – Mais la temps est de l’argent, s’écria le Baron… le vôtre surtout, Monsieur Sholmès. Aussi, droit au but ! Que pensez-vous de l’affaire ? Espérez-vous la mener à bien ?

      – Pour la mener à bien, il faudrait d’abord la connaître.

      – Vous ne la connaissez pas ?

      – Non, et je vous prie de m’expliquer les choses par le menu et sans rien omettre. De quoi s’agit-il ?

      – Il s’agit d’un vol.

      – Quel jour a-t-il eu lieu ?

      – Samedi dernier, répliqua le Baron, dans la nuit de samedi à dimanche.

      – Il y a donc six jours. Maintenant je vous écoute.

      – Il faut dire d’abord, Monsieur, que ma femme et moi, tout en nous conformant au genre de vie qu’exige notre situation, nous sortons peu. L’éducation de nos enfants, quelques réceptions, et l’embellissement de notre intérieur, voilà notre existence, et toutes nos soirées, ou à peu près, s’écoulent ici, dans cette pièce qui est le boudoir de ma femme et où nous avons réuni quelques objets d’art. Samedi dernier donc, vers onze heures, j’éteignis l’électricité, et, ma femme et moi, nous nous retirâmes comme d’habitude dans notre chambre.

      – Qui se trouve ?…

      – À côté, cette porte que vous voyez. Le lendemain, c’est-à-dire dimanche, je me levai de bonne heure. Comme Suzanne ma femme dormait encore, je passai dans ce boudoir aussi doucement que possible pour ne pas la réveiller. Quel fut mon étonnement en constatant que cette fenêtre était ouverte, alors que, la veille au soir, nous l’avions laissée fermée !

      – Un domestique…

      – Personne n’entre ici le matin avant que nous n’ayons sonné. Du reste je prends toujours la précaution de pousser le verrou de cette seconde porte, laquelle communique avec l’antichambre. Donc la fenêtre avait bien été ouverte du dehors. J’en eus d’ailleurs la preuve le second carreau de la croisée de droite – près de l’espagnolette – avait été découpé.

      – Et cette fenêtre ?…

      – Cette fenêtre, comme vous pouvez vous en rendre compte, donne sur une petite terrasse entourée d’un balcon de pierre. Nous sommes ici au premier étage, et vous apercevez le jardin qui s’étend derrière l’hôtel, et la grille qui le sépare du parc Monceau. Il y a donc certitude que l’homme est venu du parc Monceau, a franchi la grille à l’aide d’une échelle, et est monté jusqu’à la terrasse.

      – Il y a certitude, dites-vous ?

      – On a trouvé de chaque côté de la grille, dans la terre molle des plates-bandes, des trous laissés par les deux montants de l’échelle, et les deux mêmes trous existaient au bas de la terrasse. Enfin le balcon porte deux légères éraflures, causées évidemment par le contact des montants.

      – Le parc Monceau n’est-il pas fermé la nuit ?

      – Fermé, non, mais en tout cas, au numéro 14, il y a un hôtel en construction. Il était facile de pénétrer par là.

      Herlock Sholmès réfléchit quelques moments et reprit :

      – Arrivons au vol. Il aurait donc été commis dans la pièce où nous sommes ?

      – Oui. Il y avait, entre cette Vierge du XIIème siècle et ce tabernacle en argent ciselé, il y avait une petite lampe juive. Elle a disparu.

      – Et c’est tout ?

      – C’est tout.

      – Ah … et qu’appelez-vous une lampe juive ?

      – Ce sont de ces lampes en cuivre dont on se servait autrefois, composées d’une tige et d’un récipient où l’on mettait l’huile. De ce récipient s’échappaient deux ou plusieurs becs destinés aux mèches.

      – Somme toute, des objets sans grande valeur.

      – Sans grande valeur en effet. Mais celle-ci contenait une cachette où nous avions l’habitude de placer un magnifique bijou ancien, une chimère en or, sertie de rubis et d’émeraudes qui était d’un très grand prix.

      – Pourquoi cette habitude ?

      – Ma foi, Monsieur, je ne saurais trop dire. Peut-être le simple amusement d’utiliser une cachette