А. Г. Вишневский

Перехваченные письма. Роман-коллаж


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grâce aux 10 livres que me donne par mois, la bonne petite Ksenia Trofimovna, mais quand cet argent tarde (comme à présent) – la crainte me saisit. Oh! que cette misère m'apprenne enfin l'humilité. J'ai cherché ces derniers temps un abri constant – d'abord près de l'Armée du Salut et puis chez les diaconesses protestantes! Rien n'a réussi. Je dois continuer comme je le fais. Je dois surtout prier, prier de toute mon âme afin que Dieu touche enfin cette âme engourdie et me fasse sentir (mot souligné) sa présence. Mon corps malade et la nécessité de me soigner sont mon obstacle à l'activité naturelle qui me manque, et au secours religieux que je ne puis aller chercher![36]

      Le 8/21 juillet 1926

      Aujourd'hui en ouvrant le journal j'y lis la mort subite de Dzerjinski, ce terrible chef de la Tcheka et du G.P.U. qui a couvert la Russie de tortures et d'assassinats pendant les 9 années de son pouvoir illimité! Il est mort en pleine période d'activité d'un arrêt de cœur! Le voilà donc transporté devant le jugement de Dieu. Et il reverra tous ses milliers de victimes qui seront un témoignage accablant contre lui! О désespoir! О douleur! Je tire le rideau sur cette horrible vision!..

      Léon R. est venu déjeuner ici. Il est entré chez moi et m'a apporté de belles roses. Sa femme n'était pas encore arrivée et il est resté chez moi quelque temps causant agréablement. Il m'a dit qu'il avait beaucoup regretté que Kot eût refusé la place que lui avait procurée un de ses amis. Il lui aurait fait d'emblée une situation de 1500 fr. par mois ou 2 mois – et cela aurait encore augmenté et il l'aurait surveillé et habitué aux affaires. Il aurait été libre depuis 5 heures et aurait eu le temps de s'occuper de peinture ou de littérature; et les appointements réguliers auraient été suffisants pour faire vivre la famille – Véra y compris. Je lui ai répondu que j'avais le même regret. En effet. C'est une chose si rare que d'avoir un chemin ouvert dès le début, qu'il faut s'en saisir avec empressement en voyant surtout cette lutte pour l'existence qui obsède toute la société.

      Il n'y a pas de temps pour la culture personnelle et les pleurnicheries qui n'aboutissent à rien. Il faut vivre et faire vivre ceux qui dépendent de vous. S'il laisse à sa femme seule le soin de subvenir aux dépenses de la vie, s'il ne se fait pas des relations utiles mais se lance seulement dans des bavardages plus ou moins intellectuels, il sera en dehors de la vie et à mesure que le temps passera il sera de moins en moins apte à trouver un emploi. Il sera une charge à lui même. Maintenant qu'il est jeune il intéresse et on l'étudié mais dans peu de temps le monde exigera plus – c'est à dire la réalisation de son idéal dans la vie et la stabilité de son existence. Rien n'éloigne comme les efforts à chercher des pleurs et je crains même que cela peut mettre en péril la stabilité du ménage[37].

      Le 18/31 juillet 1926

      Je lis avec un intérêt palpitant ce que l'on sait des événements et des désaccords qui se passent dans le gouvernement de brigands qui régit notre pauvre pays. Ce serait le moment de faire un grand coup d'Etat et une restauration monarchique que le pays accueillerait avec enthousiasme. Pour moi, et je crois que je suis seule à le dire, il faut affirmer le grand principe de la légitimité. Or le souverain légitime est sans contredit Nicolas. Il ne s'agit pas de ses mérites, il s'agit de son droit qui est irréfutable. Il aurait fallu que ce principe fût reconnu par la nation entière sans jugement ou appréciation de celui qui la représentait, que ce principe fût reconnu par la famille en premier lieu; que le G. D. Nicolas mette au service de ce principe sa popularité et son épée – et que l'Impératrice mère cesse son enfantillage de croire à la fable du Souverain vivant et caché.

      Dans l'animosité contre Kyr. il y a beaucoup de sa part de l'ancienne animosité familiale, et certainement que ce serait une douleur de plus pour elle de voir quelqu'un d'autre occuper la place de ses enfants. Elle n'a pas la hauteur d'âme de s'élever au-dessus de ses griefs et antipathies personnelles et voir par dessus tout – le salut de la Russie dans la réunion de toute la nation autour du sceptre d'un seul homme quelque faible qu'il soit. Le mieux serait de faire taire les exigences de tous les partis qui se contredisent et s'entre-déchirent. Je suis toujours très attachée à l'Impératrice étant restée peut-être la dernière de ses relations de ses premières années en Russie. Je l'aime et j'admire son cœur pur et aimant, la dignité de sa vie et la noblesse de ses sentiments, elle est profondément entrée dans mon cœur. Mais mon esprit ne peut pas ne pas voir combien elle a fait fausse route et combien son refus de voir Kyr. a compliqué la situation de dissension dans la famille Impériale, a mis la dissension dans l'émigration… Le G. D. Nicolas vieillit dans l'inaction[38].

      Le 1/13 août 1926

      Nous avons eu un soir les Galitzine. Ils travaillent tous deux, lui dans un

      restaurant et elle dans un bureau des commissions. Les Kots étaient là aussiet elle m'a paru gentille et bonne. Ils sont occupés de se faire leurs positions et n'aident en rien Véra. Celle-ci espérait avoir un logement avec eux, mais ceci n'entre pas dans leurs plans. Je voudrais tant que ma chère Véra trouve une occupation, car je ne puis plus la prendre à ma charge. Elle est bien gentille et je suis enchantée de passer ce mois avec elle mais tout est si cher que je ne pourrai pas continuer indéfiniment[39].

      Владимир Голицын – Вере Анатольевне Татищевой

      17 июня 1927

      Prince Vladimir Galitzine

      Byron House, 7, St. James's Street London, S.W.I.

      Дорогая графиня Вера Анатольевна,

      Письма – ваше и Никино – прочел с большим интересом и очень благодарю вас. Я уже некоторое время не писал им, зная, как это опасно. Надеюсь, что Ники еще не начинал хлопотать об разрешении о выезде, момент очень неподходящий, и это только могло бы привлечь внимание властей к нему. Мы с женой так бы хотели выписать их сюда и готовы выслать им денег на переезд, но считаем, что сейчас надо обождать, так как очень уж неспокойно там со всеми этими арестами. Надо дать улечься тревоге. Если будет возможность, то напишите, чтобы они сидели смирно и пока не хлопотали даже о выезде в Финляндию.

      Здоровье Ирины меня беспокоит, надо, чтобы она питалась хорошо. Я бы хотел послать немного денег им, тете и сестре Наде, но отсюда боюсь это делать. Если вы думаете, что это можно сделать из Парижа через вас, то, пожалуйста, напишите мне, и я пришлю деньги для перевода.

      Кланяйтесь