Victory Storm

Tu Es À Moi


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il se leva d’un coup, s’apprêtant à partir.

      Pleine d’espérance, je me hasardai à lui demander, “Viendras-tume voir demain encore ?” Mais pour toute réponse il me lança uncoup d’œil fuyant et partit sans me dire au revoir. Commetoujours.

      Cinq jours passèrent.

      Chaque soir, à la même heure, Aleksej apparaissait à la porte,s’asseyait à distance et me regardait.

      Pas de salutation ni d’allusion à mon état, étant donné que leneurologue le tenait au courant.

      Un mur de silence se dressait entre nous, jusqu’au moment où jeposais une nouvelle question, à laquelle il avait toujours uneréponse prête.

      C’est ainsi que j’avais appris ma date de naissance : le seizeoctobre, vingt-neuf ans plus tôt, à Seattle. Apparemment je n’avaisplus de rapport avec ma famille depuis pas mal d’années et tout cequ’Aleksej avait pu me dire était que ma mère, Ulita Smirnov, étaitd’origine russe, alors que mon père, Jacob Palmer, était américain.J’étais fille unique.

      Je n’avais pas de domicile fixe ni un travail digne de cenom.

      Je lui avais demandé ce que je faisais pour lui mais il nem’avait pas répondu.

      “Eh bien, quelle est la question du jour ?”, commença Aleksej encet instant.

      “Ai-je fait des études supérieures ?”

      “Je n’en sais rien.”

      “Ai-je des amis ?”

      “Non.”

      “Penses-tu que je devrais prendre contact avec ma famille ? Lefait de les voir m’aiderait peut-être à recouvrer la mémoire.”

      “J’ai déjà fait des recherches à leur sujet, sans résultat.Peut-être ne sont-ils plus de ce monde.”

      “Oh”, murmurai-je, accablée.

      “Où irai-je lorsque je sortirai d’ici ? Es-tu vraiment sûr queje n’aie pas un domicile ?”

      “Oui.”

      “Alors où ai-je vécu pendant toutes ces années ? Où sont meseffets personnels ?”

      “Ils sont chez moi.”

      “Chez toi ?!”

      “Oui.”

      “Pourquoi ?”

      Avant qu’Aleksej répondît, l’infirmière, qui m’avait conduitefaire une dernière résonnance magnétique quelques heures plus tôt,pénétra dans la chambre.

      “Excusez-moi. Mademoiselle, je vous rapporte la bague que nousavions ôtée pour vous faire passer l’IRM. Pardonnez-moi pour ladistraction ; elle était tombée par terre et je ne l’avais pasvue”, bredouilla-t-elle d’un air embarrassée, regardant Aleksejavec crainte pendant qu’elle déposait la bague sur le bord de latable de nuit.

      Au cours des derniers jours j’avais souvent joué avec cettebague, comme un anti-stress, sans jamais me demander quel rapportce bijou pouvait bien avoir avec moi. Mon esprit était trop confuset anxieux pour y penser.

      Je remerciai l’infirmière et elle disparut aussitôt.

      Je me penchai en avant pour saisir le seul objet personnel quime restait mais, involontairement, de l’extrémité de mes doigts, jele fis tomber par terre.

      Je m’assis lentement, posai les pieds au sol et tentai dem’incliner. Mais la tête commença à me tourner et je sentais quemes jambes ne me porteraient pas si je devais m’accroupir.

      Heureusement Aleksej vint à mon secours et me prit le bras.

      “Tu as peut-être perdu la mémoire mais pas ta passion pour lesdiamants, en tout cas”, s’écria Aleksej d’une voix tranchante,saisissant la bague pour me la tendre.

      Prenant la bague de ses mains je demandai : “S’agit-il de vraisdiamants ?” Je fis ce geste sans le toucher car j’avais récemmentremarqué à quel point il gardait ses distances.

      “Oui.”

      Je la tournai entre mes doigts.

      Elle était splendide et brillait d’un vif éclat. Elle semblaitextrêmement précieuse.

      C’était une bague exceptionnelle, la plus belle qu’il m’aitjamais été donné de voir.

      Cette phrase me traversa l’esprit.

      Émue et troublée par ce souvenir, je regardai Aleksej.

      Il était assis à côté de moi et sa jambe droite frôlait lamienne.

      Il y avait quelque chose d’intime dans ce contact.

      Je parcourus son corps du regard, jusqu’au visage.

      Et je vis.

      Nous n’étions plus dans une chambre d’hôpital mais dans unbureau luxueux, aux meubles d’acajou.

      Mes jambes n’étaient plus à côté de celles d’Aleksej mais poséessur les siennes.

      J’étais assise sur ses genoux.

      Je pouvais entendre ma voix au loin, prononcer des paroles commeproposition et mariage.

      Oui, je le veux, Aleksej. Je t’épouserai.

      Je sursautai, éperdue, et le flash-back s’interrompit instantanément.

      Je retrouvai devant moi l’homme de mes souvenirs.

      “Tout va bien ?”, demanda-t-il à l’improviste d’un ton sérieux,comme s’il comprenait ce dont je me souvenais.

      J’acquiesçai hésitante.

      Je comprenais à présent les raisons de sa haine, mais pas aupoint de m’abandonner seule et sans assistance.

      Comment aurait-il pu accepter d’avoir épousé une criminelle?

      Combien de mensonges lui avais-je racontés ?

      “Tu ne m’as pas dit que nous étions mariés », parvins-je àarticuler malgré l’embarras.

      Contrarié, il réagit : “Pardon ?!”, s’éloignant brusquement.

      “Avons-nous des enfants également ?”

      “De quoi diable parles-tu ?”

      “J’ai eu un flash-back où nous étions tous les deux : tu m’as donnécette bague et je crois que tu m’as fait une demande en mariage.Tout était un peu confus mais je me rappelle clairement t’avoir ditque j’en avais envie et que je t’épouserais.”

      Passant la main dans ses cheveux avec fébrilité, au point dedéfaire sa coupe toujours parfaite, il m’interrompit. “Nous nesommes pas mariés.”

      Cela m’inquiéta davantage : “Donc j’ai été victime d’unehallucination”.

      “Non, tu te rappelles bien, plus ou moins.”

      “Et donc ?”

      Aleksej me fixa intensément, d’une expression indéfinissable quifit battre mon cœur avec intensité.

      “Oui, nous devions nous marier, mais avec l’accident il a fallutout ajourner”, me répondit-il prudemment.

      “Pourquoi ne pas me l’avoir dit plus tôt ? As-tu honte de moi dufait que je suis une voleuse ?”

      Aleksej ne répondit point mais il continua à me dévisager d’unair incrédule.

      “Tu m’as dit que je t’ai trahi. Cela signifie que j’ai couchéavec quelqu’un d’autre, n’est-ce-pas ? C’est bien ce que tu voulaisme dire ? Ou bien est-ce parce que je t’avais dissimulé mon passéde délinquante ?”, poursuivis-je sans broncher, décidée à obtenirdes réponses.

      “Je dois m’en aller”, répondit-il sèchement, après un longsilence qui m’épuisa.

      Je le suppliai : “Non, attends