ne Le connais maintenant dans ma vie actuelle. Je peux et je voudrais me rapprocher de Lui; ma vie entière tend à cela. Mais ce rapprochement n'augmente aucunement ma connaissance de Dieu. Toute tentative de mon imagination me démontrant que je le conçois (par exemple, lorsque je me l'imagine créateur ou miséricordieux, ou quelque chose d'analogue) m'éloigne de lui et arrête mon rapprochement de Lui. Même le pronom «Il», appliqué à Dieu, détruit en quelque sorte pour moi toute sa signification. Le mot «Il» le diminue.
Tout ce qu'on peut dire de Dieu ne Lui ressemble pas. On ne peut dépeindre Dieu par des paroles.
L'homme raisonnable trouve en lui-même la conception de son âme, de lui-même et de l'âme de l'univers, qui est Dieu; et en reconnaissant l'impossibilité d'amener ces conceptions à la netteté complète, il s'arrête docilement devant elles, sans toucher à ce qui les voile.
Mais il y a eu et il y a encore des gens d'un esprit et d'une sagesse raffinés et qui veulent expliquer la conception de Dieu par des paroles. Je ne condamne pas ces gens. Néanmoins, ils ont tort lorsqu'ils affirment qu'il n'y a pas de Dieu, et un pareil athéisme ne peut durer. D'une façon ou d'une autre, l'homme aura toujours besoin de Dieu. Si Sa divinité s'était révélée à vous avec plus d'éclat encore que jusqu'à présent, je suis convaincu que ceux qui contestent Dieu inventeraient de nouvelles subtilités pour Le nier. La raison se plie toujours devant les exigences du cœur.
Penser qu'il n'y a pas de Dieu, revient au même d'après Lao-Tseu, que de croire que l'air qui sort d'un soufflet, a le soufflet pour origine et que le soufflet pourrait fonctionner là où il n'y aurait pas d'air.
Lorsque les gens de mauvaise vie disent que Dieu, n'existe pas, ils ont raison: Dieu n'existe que pour ceux qui regardent de Son côté et se rapprochent de Lui. Mais pour celui qui s'est détourné de Lui et s'en éloigne, il ne peut y avoir de Dieu.
Deux catégories d'hommes connaissent Dieu. Ceux qui ont le cœur modeste – qu'ils soient sages ou sots – et ceux qui sont vraiment intelligents. Seuls, les hommes orgueilleux et d'intelligence médiocre ne connaissent pas Dieu.
Moïse dit à Dieu: «Où te trouverai-je, Seigneur?» – Dieu lui répondit: «Tu m'as déjà trouvé, si tu Me cherches».
Prouver que Dieu existe! Il ne peut y avoir rien de plus stupide que l'idée de prouver l'existence de Dieu. Le faire, c'est vouloir prouver la raison de sa vie. A qui? Comment? Pourquoi? Si Dieu n'existe pas, il n'y a rien. Or, comment dès lors prouver Son existence?
Dieu existe. Point n'est besoin de le prouver. Le faire, serait blasphémer; le nier, une folie. Dieu demeure dans notre conscience, dans la conception de l'humanité entière, dans la structure de l'univers. Seul un homme très misérable ou très dépravé peut nier Dieu sous la voûte du ciel étoile, sur la tombe des êtres chers ou devant la mort heureuse d'un martyr.
«Je ne comprends pas ce que signifie l'amour de Dieu. Peut-on aimer l'inconcevable et l'inconnu? On peut aimer son prochain, c'est compréhensible et bien. Mais aimer Dieu, ce sont des paroles vides de sens.» Ainsi parlent bien des gens. Mais ceux qui le disent et le pensent se trompent lourdement: ils ne comprennent pas ce qu'est aimer son prochain – non pas un homme agréable ou qui nous est utile, mais indifféremment tout homme, quand même il serait le plus désagréable et le plus hostile. Seul, celui qui est le même partout, peut aimer ainsi son prochain. De sorte que ce n'est pas l'amour de Dieu qui est incompréhensible, mais l'amour du prochain sans l'amour de Dieu.
CHAPITRE III
DE L'ÂME
Nous appelons Dieu, l'impalpable, l'invisible, l'immatériel, celui qui donne la vie à tout et qui existe. Nous appelons âme le même élément impalpable, invisible et immatériel, séparé par le corps de tout le reste et que nous reconnaissons comme nous-mêmes.
Si l'homme vit longtemps, il subit diverses transformations: il est enfant, puis adolescent, adulte, vieillard. Mais, malgré ses changements, il dit toujours «moi» en parlant de lui-même. Et ce «moi» a toujours été le même: dans l'enfant, dans l'adulte, dans le vieillard. C'est ce «moi» immuable que nous appelons âme.
Si l'homme pense que tout ce qui l'entoure, tout l'univers infini, est tel qu'il le voit, il se trompe fort. L'homme connaît tout ce qui est matériel uniquement parce qu'il a tels vue, oui toucher. Si ces sens étaient autres, le monde entier serait différent. De sorte que nous ne savons pas et ne pouvons savoir quel est exactement le monde matériel où nous vivons. Ce que nous connaissons sûrement et entièrement, c'est notre âme.
Lorsque nous parlons de notre «moi», nous n'entendons pas notre corps, mais ce qui le fait vivre. Qu'est-ce que le «moi»? Nous ne pouvons le définir par des paroles, mais nous le connaissons mieux que tout ce que nous savons. Car nous savons que si nous n'avions pas ce «moi», nous ne saurions rien, nous n'aurions rien au monde, et nous n'aurions pas existé nous-mêmes.
Lorsque je réfléchis, il m'est plus difficile de comprendre ce qu'est mon corps que ce qu'est mon âme. Le corps a beau nous être proche, il nous est toujours étranger; seule l'âme est à soi.
Si l'homme ne sent pas l'âme en soi, cela ne veut pas dire qu'il n'a pas d'âme, mais cela prouve seulement qu'il n'a pas encore appris à la connaître.
Tant que nous ne comprenons pas ce qui est en nous, quel intérêt avons-nous à savoir ce qui est en dehors de nous? Et peut-on connaître le monde avant de s'être compris soi-même? Celui qui est aveugle chez lui, peut-il voir lorsqu'il est chez les autres?
De même que la bougie ne peut pas brûler sans feu, l'homme ne peut pas vivre sans force spirituelle. L'esprit vit dans tous les hommes, mais tous les hommes ne le savent pas.
La vie de ceux qui le savent est heureuse, et la vie de ceux qui l'ignorent est malheureuse.
Nous avons mesuré la terre, le soleil, les étoiles, les profondeurs des mers; nous descendons dans l'antre de la terre pour y chercher de l'or; nous avons trouvé des rivières et des montagnes sur la lune; nous découvrons de nouveaux astres et connaissons leurs dimensions; nous nivelons des précipices, nous construisons des machines compliquées; chaque jour apporte de nouvelles et toujours de nouvelles inventions. Que ne savons-nous pas? que de choses nous pouvons faire! Seulement, il y a une chose absolument essentielle qui nous manque. Et nous ne saurions préciser ce que c'est. Nous sommes pareils à un petit enfant: il sent qu'il n'est pas à son aise, mais il ne sait pas pourquoi.
Nous sommes malheureux, parce que nous savons beaucoup de choses inutiles et que nous ignorons l'essentiel, c'est nous-mêmes. Nous ne connaissons pas ce qui est en nous. Si nous savions et si nous nous souvenions de ce qui est en nous, notre vie serait toute différente.
Nous ne pouvons savoir ce qu'est en réalité tout ce qui est matériel en ce monde. Nous ne pouvons connaître parfaitement que ce qui est spirituel en nous-mêmes, ce qui est nous-mêmes et ce qui ne dépend ni de nos sentiments ni de nos pensées.
Les hommes croient souvent que seules les choses qu'ils peuvent toucher de leurs mains existent. Bien au contraire: existe seulement ce qu'on ne peut voir, ni entendre, ni palper, ce que nous appelons notre «moi» – notre âme.
Confucius disait: Le ciel et la terre sont grands, mais ils ont une couleur, une forme, une dimension, alors qu'en l'homme