que Dieu pénètre de plus en plus en elle.
On dit: «Aurais-tu oublié Dieu?» C'est une bonne parole. Oublier Dieu, c'est oublier Celui qui vit en toi et par qui tu vis.
De même que j'ai besoin de Dieu, Dieu a besoin de moi.
Lorsque tu t'affaiblis et que tu es malheureux, tu dois te rappeler que tu as une âme et que tu peux vivre par elle. Mais au lieu de cela, nous nous imaginons que des hommes pareils à nous-mêmes peuvent nous réconforter.
Celui qui est uni à Dieu, ne doit pas craindre Dieu. Dieu ne saurait se faire de mal à Lui-Même.
Les poissons de la rivière apprirent un jour que les hommes disaient qu'ils ne pouvaient vivre que dans l'eau. Et les poissons s'en étonnèrent et se mirent à s'interroger entre eux afin d'apprendre si quelqu'un savait ce que c'est que l'eau. Alors, un poisson intelligent dit: «On raconte qu'il y a dans la mer un vieux et sage poisson qui sait tout; allons le trouver et demandons-lui ce qu'est l'eau.» Et les poissons se dirigèrent vers l'endroit de la mer où habitait le sage et lui demandèrent ce qu'était l'eau. Et le sage poisson dit: «L'eau c'est ce qui nous fait vivre. Si vous ne la connaissez pas c'est parce que vous vivez dans l'eau et d'eau.»
De même, il semble parfois aux hommes qu'ils ne savent pas ce qu'est Dieu, mais ils vivent eux-mêmes en Lui.
«Celui qui m'a envoyé est véritable, et les choses que «j'ai entendues de Lui, je les dis dans le monde.»
Ils ne comprirent point qu'Il parlait du Père. Et Jésus leur dit: «Lorsque vous aurez élevé le Fils de l'Homme, «vous connaîtrez qui Je suis, et que Je ne fais rien de «Moi-même, mais que Je dis les choses comme Mon «Père Me les a enseignées.
Élever le Fils de l'Homme, c'est avoir conscience de l'esprit qui vit en nous et l'élever au-dessus de la chair.
L'âme et le corps sont ce que l'homme considère comme sien, ce dont il s'occupe constamment. Mais on doit savoir que le vrai «toi» n'est pas ton corps, mais ton âme. Souviens-toi de cela, élève ton âme au-dessus de ta chair, préserve-là de toute souillure humaine, ne permets pas à ta chair de l'étouffer – et tu auras une vie heureuse.
On dit qu'on ne doit pas s'aimer soi-même. Mais sans l'amour de soi-même, il n'y aurait pas de vie. Il s'agit de savoir ce qu'il faut aimer en soi: son âme ou son corps.
Il n'est pas de corps vigoureux qui n'aura jamais été malade; il n'est pas de richesses qui ne disparaîtront jamais; il n'est pas de pouvoir qui n'aura pas de fin. Si l'on consacre toute sa vie à devenir vigoureux, riche, puissant, et qu'on arrive à obtenir ce à quoi l'on aspire, on devra tout de même s'inquiéter, craindre et s'attrister, parce qu'on verra tout ce qu'on a cherché dans sa vie vous échapper, parce qu'on constatera que l'on se fait vieux et que l'on approche de la mort.
Que faire pour ne pas s'inquiéter, pour ne pas avoir peur?
Il n'y a qu'un seul moyen: il consiste à consacrer sa vie non pas à ce qui passe, mais à ce qui ne périt pas et ne peut périr, à l'esprit qui vit dans l'homme.
Accomplis ce que ton corps exige de toi: cherche à obtenir la gloire, les honneurs, la richesse, et ta vie sera un enfer. Fais ce que veut l'esprit qui réside en toi: cherche l'humilité, la clémence, l'amour, et tu n'auras pas besoin de paradis. Le paradis sera dans ton âme.
Tout homme a des devoirs envers le prochain et des devoirs envers lui-même, envers l'esprit qui vit en lui; ces devoirs consistent à ne pas souiller, à ne pas supprimer, à ne pas étouffer cet esprit et à le cultiver sans cesse.
L'homme vit par l'esprit et non par le corps. Lorsque l'homme le sait et qu'il a voué sa vie à l'esprit et non au corps, on peut le mettre aux fers, le verrouiller derrière des lourdes portes, il sera toujours libre.
Tout homme connaît deux vies: la vie charnelle et la vie spirituelle. Dès qu'elle atteint sa plénitude, la vie charnelle commence à faiblir. Et elle faiblit de plus en plus et arrive à la mort. La vie spirituelle, au contraire, grandit et devient toujours plus ferme, depuis la naissance jusqu'à la mort.
Si l'homme ne vivait que de la vie charnelle, toute son existence serait celle d'un condamné à mort. S'il vivait pour son âme, le bonheur qu'il y trouverait grandirait de jour en jour, et la mort ne l'effrayerait pas.
Pour mener une existence heureuse, point n'est besoin de savoir d'où tu es venu et ce que tu deviendras dans l'autre monde. Pense uniquement à ce que veut ton âme, et tu n'auras pas besoin de t'inquiéter d'où tu es issu et ce qui t'arrivera après la mort. Tu n'auras pas besoin de tout cela, parce que tu éprouveras le bonheur complet qui ne s'inquiète ni du passé ni de l'avenir.
Lorsque le monde commença à exister, la raison fut sa mère. Celui qui est conscient du fait que la base de sa vie est l'esprit, sait qu'il se trouve hors de tout danger. Lorsqu'à la fin de sa vie, ses lèvres se fermeront et les portes de ses sens retomberont, il n'éprouvera aucune inquiétude.
CHAPITRE IV
MÊME ÂME CHEZ TOUS
Tous les êtres vivants sont séparés par leurs corps les uns des autres; mais l'origine la vie est la même pour tous.
La doctrine chrétienne révèle aux hommes que le même principe spirituel vit en eux tous, qu'ils sont tous frères, et elle les unit ainsi pour une heureuse vie commune.
Il ne suffit pas de se dire que chaque homme a la même âme que moi; il faut se dire qu'en chaque homme vit le même principe qui vit en moi. Tous les hommes sont séparés les uns des autres par leurs corps, mais ils sont tous unis par le même principe spirituel qui donne la vie à tout.
C'est un grand bonheur que d'être en communion avec les hommes; mais comment faire pour s'unir à tous? Je peux m'unir aux membres de ma famille; mais aux autres? Je peux m'unir à mes amis, à tous les Russes, à tous mes coreligionnaires. Mais comment faire pour m'unir à ceux que je ne connais pas, les étrangers, ceux qui professent une autre religion? Il y a tant d'hommes et ils sont tous si différents! Comment faire?
Il n'existe qu'un moyen: oublier les hommes, ne pas penser à s'unir à eux, et ne songer qu'à s'unir au seul principe spirituel qui vit en moi et en tous les hommes.
On dit que chaque homme peut être très bon et très mauvais et qu'il manifeste l'un ou l'autre sentiment suivant ses dispositions. C'est parfaitement exact.
La vue des souffrances d'autrui provoque, non seulement chez des personnes différentes, mais chez le même homme des sentiments absolument contradictoires: parfois, la compassion, et, parfois, une sorte de mauvais plaisir qui va jusqu'à la plus cruelle méchanceté.
J'ai eu l'occasion de le constater sur moi-même: tantôt j'avais pour tous les êtres une profonde compassion, tantôt j'éprouvais la plus grande indifférence, et, parfois, de la haine même.
Cela, prouve clairement que nous avons deux façons, absolument opposées, de concevoir les choses: l'une, quand nous nous considérons comme des êtres séparés, quand tous les êtres nous sont absolument étrangers et qu'ils ne sont pas «moi». Dans ce cas, nous ne pouvons éprouver pour eux autre chose que de l'indifférence, de l'envie, de la haine, de la malveillance.
L'autre façon de