dit donc qu'il faut la donner aux hirondelles.
Traitez entre vous deux et arrangez-vous. Moi, puisque c'est votre avis, je me tairai.
Tout ce que tu demandes, je suis d'avis de te l'accorder. Mais viens au ciel avec nous pour recevoir Basiléia et tout le reste.
Ces oiseaux-là ont été tués fort à propos pour les noces.
Voulez-vous que je reste ici pour faire cuire les viandes?
Faire cuire les viandes? ce sont propos de vrai goinfre. Ne viens-tu pas avec nous?
Je m'en serais bien donné!
Qu'on m'apporte ici une khlamyde nuptiale!
A Phanæ, près de la klepsydre, est la race malfaisante des englottogastres, qui moissonnent, sèment et vendangent avec leurs langues, et cueillent aussi les figues. C'est une race barbare, des Gorgias, des Philippos. C'est à cause de ces Philippos englottogastres que partout, en Attique, la langue des victimes est coupée à part.
O vous, dont le bonheur extrême est au-dessus de toute parole, ô race trois fois heureuse des oiseaux légers, recevez votre roi dans vos demeures fortunées. Il s'avance sous nos yeux, plus lumineux qu'un astre, vers son palais brillant d'or, et le disque du soleil ne rayonne pas d'un plus vif éclat. Ainsi vient-il, ayant une femme d'une indicible beauté, brandissant la foudre, le trait ailé de Zeus: une senteur ineffable embaume les profondeurs célestes; spectacle enchanteur. Et des effluves d'encens soulèvent des spirales de fumée. Mais le voici lui-même. Que la Muse divine ouvre sa bouche sainte à des chants propices.
Recule, écarte-toi, avance, reviens! Voltigez d'une aile heureuse autour de cet homme heureux. O! pheu! pheu! quelle fraîcheur! quelle beauté! O! quel heureux mariage tu contractes pour notre ville! De grands, de grands bonheurs sont l'oeuvre de la race des oiseaux en faveur de cet homme. Accueillons-le par des chants de fiançailles et d'hyménée, lui et la Royauté. Jadis Hèra, dans l'Olympos, fut ainsi conduite par les Moires vers le trône souverain du grand maître des dieux: tel fut leur hyménée. Hymen, ô! hyménée, ô! Érôs au teint fleuri, aux ailes d'or, tendait les rênes en arrière, guidant les noces de Zeus et de la bienheureuse Hèra. Hymen, ô! hymen, ô!
Je suis charmé de vos hymnes, charmé de vos chants, ravi de vos paroles. Voyons, maintenant, chantez les mugissements souterrains du tonnerre, les éclairs brûlants de Zeus, sa foudre terrible et étincelante.
O immense lumière dorée de l'éclair, traits immortels de Zeus, qui portent la flamme, ô bruissements terrestres, ô tonnerres et pluies d'orage, par lesquels, en ce moment, il ébranle la terre. C'est à toi qu'il doit l'empire du monde et que Basiléia est l'épouse de Zeus! Hymen, ô! hyménée, ô!
Suivez à présent le cortège des époux, nombreuses tribus de la gent ailée, rendez-vous au palais de Zeus, au lit nuptial… Tends-moi la main, heureuse épouse, saisis mes ailes et danse avec moi. Je t'enlève doucement dans les airs avec moi.
Halalalé! Io, Pæan! Tènella! Victoire! ô le plus grand des dieux!
LYSISTRATA
(L'AN 412 AVANT J.-C.)
Cette pièce est une protestation contre la guerre, poussée aux dernières limites des hardiesses de l'ancienne comédie. Lysistrata, épouse d'un magistrat athénien, forme une ligue avec Calonice, Myrrhina, Lampito et d'autres femmes, pour hâter la conclusion d'une trêve entre les Athéniens et les Spartiates. Elles s'engagent par un serment solennel à se séparer de leurs maris, jusqu'à ce que la paix soit faite. Elles s'emparent ensuite de la citadelle et résistent à toute proposition qui ne tend pas à une trêve immédiate. On conclut enfin un accommodement: le traité se négocie, les portes de la citadelle s'ouvrent, et la pièce se termine par des chants, des danses et des festins.
PERSONNAGES DU DRAME
LYSISTRATA.
KALONIKÈ.
MYRRHINA.
LAMPITO.
CHOEUR DE VIEILLARDS.
CHOEUR DE FEMMES.
STRATYLLIS.
UN PROBOULOS.
SKYTHES, personnages muets.
QUELQUES FEMMES.
KINÉSIAS.
UN ENFANT.
MANÈS, personnage muet.
UN HÉRAUT DE LAKÉDÆMÔN.
ENVOYÉS LAKÉDÆMONIENS.
UN ATHÉNIEN.
LA PAIX, personnage muet.
QUELQUES FLANEURS.
UN SERVITEUR.
La scène se passe à Athènes, sur une place publique.
LYSISTRATA
Ah! si on les avait convoquées au temple de Bakkhos, ou de Pan, ou de Kolias, ou de Génétyllis, il serait impossible de passer, à cause des tambourins. Aujourd'hui, il n'y a ici pas une femme, sauf ma voisine, qui sort de chez elle. Bonjour, Kalonikè.
Et à toi aussi, bonjour, Lysistrata. Qu'est-ce donc qui te tracasse? N'aie pas cet air sombre, chère enfant: cela ne te va pas de darder les sourcils.
Moi, Kalonikè, le coeur me bout, et je souffre mille maux, pour nous autres femmes, de voir nos maris nous regarder comme des êtres malfaisants.
Et nous le sommes, de par Zeus!
On leur avait dit de se trouver ici pour délibérer sur une affaire d'importance, elles dorment et ne viennent pas.
Mais, ma chère, elles viendront. Il n'est pas facile aux femmes de sortir. De nous, l'une est occupée auprès de son mari, l'autre éveille son esclave, celle-ci couche son enfant, celle-là le baigne, une autre lui donne à manger.
Mais il y a, pour elles, des affaires plus pressantes que celles-là.
Qu'est-ce donc, ma chère Lysistrata? Dans quelle intention convoques-tu les femmes? Pour quelle affaire? Est-elle grande?
Grande.
Est-elle grosse?
De par Zeus! elle est grosse.
Pourquoi alors ne venons-nous pas?
Ce n'est pas ce que tu crois, car nous nous serions pressées de venir. Mais il s'agit d'une affaire que j'ai méditée et retournée durant de nombreuses insomnies.
Il faut que ce soit mince pour avoir été tant retourné.
Si mince que des femmes dépend le salut de la Hellas tout entière.
Des femmes: il dépend donc de peu de chose.
Les affaires de la cité sont en notre pouvoir. Avant peu il n'y aura plus de Péloponésiens.
Voilà qui est au mieux, de par Zeus!
Les Boeotiens sont tous exterminés.
Non, pas tous: fais grâce aux anguilles!
Pour Athènes, je ne