Берардино Нарделла

Désirs


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d’un tel système, y sommes assujettis, nous ne pouvons y échapper.

      Bien que notre vie soit formée d’un ensemble de tranches de vie lesquelles, mises ensemble, forment la ligne temporelle dans laquelle nous avons vécu et continuerons à vivre, nous vivons pratiquement dans un éternel présent : au sens où chaque instant de notre existence, dès l’instant où il a été vécu, devient du passé et ne peut plus être vécu, sauf en esprit.

      On peut en dire autant du futur, une série de possibilités logiques qui pourraient se vérifier mais qui, elles aussi, n’existent que dans notre cerveau.

      Certes, d’un côté nous sommes assujetti au temps sans espoir d’y échapper, d’autre part il est vrai qu’en réalité nous ne vivons que dans le présent, la seule dimension qui existe pour nous.

      Une fois l’instant passé, tels que nous l’écrivions tout à l’heure, il devient le passé et n’existe plus du point de vue physique ; il n’existe que comme “effet” de ce que nous avons fait et pensé.

      Au contraire, le futur n’existe que comme dimension dans notre mode de pensée, il n’existe qu’à partir du moment où nous y projetons nos espoirs ou nos inquiétudes.

      Donc nous sommes bien la somme de nos passés mais, bien que nous en soyons le produit, le passé a cessé d’exister et il pourrait disparaître à l’intérieur de nous-mêmes si nous cessions de nous y reporter et à nous juger par rapport à lui.

      Le futur est déterminé par nos actions et nos décisions de l’instant présent et, bien qu’il soit lié à l’incertitude, à ce que d’aucuns définissent coïncidences et d’autres le destin, il demeure un sous-produit de ce que je fais à l’instant présent. Donc j’écrirai un livre dans le futur -et tout va bien- ; mais si je ne devais jamais taper sur un clavier d’ordinateur ou de machine à écrire (ou employer plume et papier, pour les amoureux de la belle écriture), ce futur ne se réalisera jamais.

      L’inverse est également vrai : si tout porte à croire que le futur est déjà acquis par ce que nous faisons d’habitude -comme le fait de se rendre au travail tous les jours-, rien ne garantit que nous nous y rendrons demain ; nous pourrions tomber malade, avoir un accident ou rencontrer la femme/l’homme de notre vie ; nous pourrions dévier de notre route et nous rendre à l’aéroport ; nous pourrions devenir riches parce que le billet de loto acheté était le gagnant du gros lot, et ainsi de suite.

      De là découle l’importance fondamentale de l’instant présent, toujours contrastée par notre esprit lequel a tendance à s’attarder sur le passé ou le futur, précisément à cause du fait décrit précédemment : l’exposition de notre ego avec l’ensemble des actions passées. La vie est une succession de ces éternels instants présents ; notre esprit tend toutefois à les avoir en horreur parce que notre ego, c’est-à-dire notre personnalité basée sur la somme de nos passés, a besoin d’un continuum temporel pour pouvoir s’affirmer, afin d’exister.

      Mais il est aussi notre prison parce dans le passé se dissimulent des évènements qui nous ont blessés et qui ont encore une influence sur notre présent, comme nous le verrons par la suite.

      Dans ce chapitre nous parlons au contraire de l’instant présent et comment, aux fins de réalisation de nos propres désirs, il soit de la plus haute importance d’être au bon endroit, au bon moment, ou bien d’accomplir l’action juste guidés par l’instinct ; donc vivre l’instant présent au lieu de le rejeter.

      Plus précisément combien de personnes ont agi d’instinct, sans même y penser, action qui s’est révélée plus tard comme la meilleure chose à faire dans certaines circonstances ?

      Combien, au contraire, regrettent de ne pas avoir accompli les actions que, d’après eux, ils auraient dû faire mais que, avec l’ombre d’un doute, ils ont ajournées et, par voie de conséquence, l’occasion a été perdue ?

      Ruth-Inge Heinze (1919 - 2007), anthropologue allemande, évoque un épisode qu’elle vécut en Allemagne au cours d’une attaque aérienne pendant la seconde guerre mondiale : n’ayant pas eu le temps de rejoindre un refuge, elle se trouvait sous le portail d’entrée d’un immeuble afin de s’abriter des projectiles et des bombes. Elle raconte : “À un instant donné j’ai eu l’impulsion de courir dans la rue jusqu’à l’immeuble le plus proche, distant d’une centaine de mètres. J’échappai par miracle aux éclats de shrapnel [ projectiles creux d’artillerie contenant des ball es] qui tombaient autour de moi. À l’instant où j’atteignais l’immeuble voisin, le premier édifice où je m’étais abritée fut touché par une bombe et totalement détruit.”.

      Que se serait-il passé si, au lieu de suivre cette impulsion, le Docteur Heinze s’était arrêtée à réfléchir sur le danger qu’elle courait en sortant dans la rue ?

      Ceci est un évènement communément appelé “pressentiment” ou, selon l’expression du Docteur Julia Mossbridge, “activité anticipatoire anormale”.

      Voici un extrait de la Chartreuse de Parme de Stendhal : “Tout à coup, à une hauteur immense et à ma droite j’ai vu un aigle, l’oiseau de Napoléon ; il volait majestueusement, se dirigeant vers la Suisse, et par conséquent, vers Paris. Et moi aussi, me suis-je dit à l’instant, je traverserai la Suisse avec la rapidité de l’aigle […] A l’instant, quand je voyais encore l’aigle, par un effet singulier mes larmes se sont taries ; et la preuve que cette idée vient d’en haut, c’est qu’au même moment, sans discuter, j’ai pris ma résolution et j’ai vu les moyens d’exécuter ce voyage.”

      Donc que se passe-t-il lorsque nous avons un désir ? Avons-nous la capacité et les forces pour le réaliser ? Dans quelle mesure le monde extérieur concourt-il à son éventuelle réalisation ?

      Si nous voulons nous reposer sur un avis scientifique, arrivés à ce point il est nécessaire de parler de l’un des pères de la psychanalyse, le célèbre Carl Gustav Jung et son concept de synchronicité ou “principe des relations acausales”.

      D’un point de vue scientifique, normalement dans tout ce qui survient il y a un lien, à chaque effet correspond une cause : c’est le principe de la causalité.

      Ã€ l’inverse, Jung découvrit des phénomènes où cette règle ne s’appliquait pas et, pour cette raison, parle de liens acausaux.

      La synchronicité est donc une série d’évènements où le monde intérieur est relié au monde extérieur, sans lien apparent, comme si les choses et les personnes étaient reliées entre elles par un fil ou un réseau invisible.

      Jung nomme ce réseau inconscient collectif, là où la psyché de chaque individu se fond avec celles des autres dans un champ sans espace ni temporalité. Dans ce champ peuvent se produire des phénomènes inexplicables d’un strict point de vue scientifique, du fait de l’absence du principe de causalité.

      Dans un épisode célèbre de son livre “La synchronicité, principe de relations acausales” il parle d’une patiente très éduquée, au rationalisme cartésien si développé qu’il lui était