l'armée a débouché sur ce plateau.
L'armée ennemie se retire à force sur Magdebourg. Il est probable que plusieurs colonnes seront coupées avant d'y arriver. On n'a point de nouvelles depuis plusieurs jours du maréchal Soult, qui a été détaché avec quarante mille hommes pour poursuivre l'armée ennemie.
L'empereur a traversé le champ de bataille de Rosbach; il a ordonné que la colonne qui y avait été élevée, fût transportée à Paris.
Le quartier-général de l'empereur a été le 18 à Mersebourg; il sera le 19 à Halle. On a trouvé dans cette dernière ville des magasins de toute espèce, très-considérables.
Le maréchal Soult a poursuivi l'ennemi jusqu'aux portes de Magdebourg. Plusieurs fois les Prussiens ont voulu prendre position, et toujours ils ont été culbutés.
On a trouvé à Nordhausen des magasins considérables, et même une caisse du roi de Prusse, remplie d'argent.
Pendant les cinq jours que le maréchal Soult a employés à la poursuite de l'ennemi, il a fait douze cents prisonniers et pris trente pièces de canon, et deux ou trois cents caissons.
Le premier objet de la campagne se trouve rempli. La Saxe, la Westphalie, et tous les pays situés sur la rive gauche de l'Elbe, sont délivrés de la présence de l'armée prussienne. Cette armée, battue et poursuivie l'épée dans les reins pendant plus de cinquante lieues, est aujourd'hui sans artillerie, sans bagages, et sans officiers, réduite au-dessous du tiers de ce qu'elle était il y a huit jours; et, ce qui est encore pis que cela, elle a perdu son moral et toute confiance en elle-même.
Deux corps de l'armée française sont sur l'Elbe, occupés à construire des ponts.
Le quartier-général est à Halle.
Le général Macon, commandant à Leipsick, a fait aux banquiers, négocians et marchands de cette ville une notification4. Puisque les oppresseurs des mers ne respectent aucun pavillon, l'intention de l'empereur est de saisir partout leurs marchandises et de les bloquer véritablement dans leur île.
On a trouvé dans les magasins militaires de Leipsick quinze mille quintaux de farine et beaucoup d'autres denrées d'approvisionnement.
Le grand-duc de Berg est arrivé à Halberstadt le 19. Le 20, il a inondé toute la plaine de Magdebourg, par sa cavalerie, jusqu'à la portée du canon. Les troupes ennemies, les détachemens isolés, les hommes perdus, seront pris au moment où ils se présenteront pour entrer dans la place.
Un régiment de hussards ennemis croyait que Halberstadt était encore occupé par les Prussiens; il a été chargé par le deuxième de hussards, et a éprouvé une perte de trois cents hommes.
Le général Beaumont s'est emparé de six cents hommes de la garde du roi, et de tous les équipages de ce corps.
Deux heures auparavant, deux compagnies de la garde royale à pied avaient été prises par le maréchal Soult.
Le lieutenant-général, comte de Schmettau, qui avait été fait prisonnier, vient de mourir à Weimar.
Ainsi, de cette belle et superbe armée qui, il y a peu de jours, menaçait d'envahir la confédération du Rhin, et qui inspirait à son souverain une telle confiance, qu'il osait ordonner à l'empereur Napoléon de sortir de l'Allemagne avant le 8 octobre, s'il ne voulait pas y être contraint par la force; de cette belle et superbe armée, disons-nous, il ne reste que les débris, chaos informe qui mérite plutôt le nom de rassemblement que celui d'armée. De cent soixante mille hommes qu'avait le roi de Prusse, il serait difficile d'en réunir plus de cinquante mille, encore sont-ils sans artillerie et sans bagages, armés en partie, en partie désarmés. Tous ces événemens justifient ce que l'empereur a dit dans sa première proclamation, lorsqu'il s'est exprimé ainsi: «Qu'ils apprennent que s'il est facile d'acquérir un accroissement de domaines et de puissance avec l'amitié du grand peuple, son inimitié est plus terrible que les tempêtes de l'Océan.»
Rien ne ressemble en effet davantage à l'état actuel de l'armée prussienne que les débris d'un naufrage. C'était une belle et nombreuse flotte qui ne prétendait pus moins qu'asservir les mers; les vents impétueux du nord ont soulevé l'Océan contre elle. Il ne rentre au port qu'une petite partie des équipages qui n'ont trouvé de salut qu'en se sauvant sur des débris.
Trois lettres interceptées peignent au vrai la situation des choses.
Une autre lettre également interceptée, montre à quel point le cabinet prussien a été dupe de fausses apparences. Il a pris la modération de l'empereur Napoléon pour de la faiblesse. De ce que ce monarque ne voulait pas la guerre, et faisait tout ce qui pouvait être convenable pour l'éviter, on a conclu qu'il n'était pas en mesure, et qu'il avait besoin de deux cent mille conscrits pour recruter son armée.
Cependant l'armée française n'était plus claquemurée dans les camps de Boulogne; elle était en Allemagne: M. Ch. L. de Hesse et M. d'Haugwitz auraient pu la compter. Reconnaissons donc ici la volonté de cette providence qui ne laisse pas à nos ennemis des yeux pour voir, des oreilles pour entendre, du jugement et de la raison pour raisonner.
Il paraît que M. Charles Louis de Hesse convoitait seulement Mayence. Pourquoi pas Metz? pourquoi pas les autres places de l'ouest de la France? Ne dites donc plus que l'ambition des Français vous a fait prendre les armes; convenez que c'est votre ambition mal raisonnée qui vous a excités à la guerre. Parce qu'il y avait une armée française à Naples, une autre en Dalmatie, vous avez projeté de tomber sur le grand-peuple; mais en sept jours vos projets ont été confondus. Vous vouliez attaquer la France sans courir aucun danger, et déjà vous avez cessé d'exister.
On rapporte que l'empereur Napoléon ayant, avant de quitter Paris, rassemblé ses ministres, leur dit: «Je suis innocent de cette guerre; je ne l'ai provoquée en rien: elle n'est point entrée dans mes calculs. Que je sois battu si elle est de mon fait. Un des principaux motifs de la confiance dans laquelle je suis que mes ennemis seront détruits, c'est que je vois dans leur conduite le doigt de la providence, qui, voulant que les traîtres soient punis, a tellement éloigné toute sagesse de leurs conseils, que lorqu'ils pensent m'attaquer dans un moment de faiblesse, ils choisissent l'instant même où je suis le plus fort.»
Le maréchal Davoust est arrivé le 20 à Wittemberg, et a surpris le pont sur l'Elbe au moment où l'ennemi y mettait le feu.
Le maréchal Lannes est arrivé à Dessau; le pont était brûlé; il a fait travailler sur-le-champ à le réparer.
Le marquis de Lucchesini s'est présenté aux avant-postes avec une lettre du roi de Prusse. L'empereur a envoyé le grand-maréchal de son palais, Duroc, pour conférer avec lui.
Magdebourg est bloqué. Le général de division Legrand, dans sa marche sur Magdehourg, a fait quelques prisonniers. Le maréchal Soult a ses postes autour de la ville. Le grand-duc de Berg y a envoyé son chef d'état-major le général Belliard. Ce général y a vu le prince de Hohenlohe. Le langage des officiers prussiens était bien changé. Ils demandent la paix à grands cris. «Que veut votre empereur, nous disent-ils? Nous poursuivra-t-il toujours l'épée dans les reins? Nous n'avons pas un moment de repos depuis la bataille.» Ces messieurs étaient sans doute accoutumés aux manoeuvres de la guerre de sept ans. Ils voulaient demander trois jours pour enterrer les morts. «Songez aux vivans, a répondu l'empereur, et laissez-nous le soin d'enterrer les morts; il n'y a pas besoin de trêve pour cela.»
La confusion est extrême dans Berlin. Tous les bons citoyens, qui gémissaient de la fausse direction donnée à la politique de leur pays, reprochent avec raison aux boute-feux excités par l'Angleterre, les tristes effets de leurs menées. Il n'y a qu'un cri contre la reine dans tout le pays.
Il paraît que l'ennemi cherche à se rallier derrière l'Oder.
Le