Sophie Love

Pour Toujours et A Jamais


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      « En fait, c’est bon », dit M. Kapowski. « Il faut que je monte, vraiment. »

      « D’accord », dit Emily, qui se sentit découragée. « Vous avez une chose agréable de prévue pour la journée ? » Elle essayait de sonner comme une hôtesse de B&B plutôt qu’une fille affolée, même si elle se sentait bien plus comme la seconde.

      « Oh, non, je voulais dire qu’il faut que je rentre chez moi », corrigea M. Kapowski.

      « Vous voulez dire que vous libérez la chambre ? », demanda Emily, décontenancée.

      Elle sentit un frisson froid se propager à travers son corps.

      « Mais je vous avais inscrit pour trois nuits. »

      M. Kapowski avait l’air embarrassé.

      « Je, hum, juste besoin de rentrer. Je paieraien une fois, cependant. »

      Il semblait être pressé de partir et même quand Emily suggéra de lui faire une réduction sur le prix des deux petits-déjeuners qu’il n’avait pas mangés, il insista pour seulement payer la note en entier et partir sur-le-champ. Emily se tint à la porte et le regarda s’éloigner en voiture, en se sentant comme une incompétente absolue.

      Elle ignorait combien de temps elle était restée là debout, déplorant le désastre qu’avait été son tout premier client, mais elle s’avisa du bruit de son portable sonnant à l’intérieur. Grâce à la réception terrible qu’elle avait dans la vieille maison, le seul endroit où Emily pouvait capter le réseau était à côté de la porte d’entrée. Elle avait une table spéciale dans le hall juste pour son téléphone – une très belle pièce ancienne, qu’elle avait récupérée dans une des chambres fermées du B&B. Elle marcha à pas mesurés dans cette direction, se préparant mentalement à voir de qui il s’agissait.

      Il n’y avait pas beaucoup de bonnes options. Sa mère n’était pas entrée en contact depuis cet appel tardif et plein d’émotion qu’elles avaient partagée, au cours duquel elles avaient discuté de la vérité sur la mort de Charlotte et, plus précisément, le rôle d’Emily – ou son absence – dans celle-ci. Amy ne l’avait pas contactée depuis sa tentative cavalière de “sauver” Emily de sa nouvelle vie, même si elles avaient fait la paix depuis. Ben, l’ex d’Emily, avait appelé de nombreuses fois depuis qu’elle était partie, mais Emily n’avait pas répondu à un seul de ses appels, et maintenant leur fréquence paraissait diminuer.

      Elle se tint prête tandis qu’elle regardait l’écran. Le nom qui clignotait fut une surprise à voir. C’était Jayne, une vieille amie d’école de New York. Elle connaissait Jayne depuis qu’elle était très jeune, et au fil des ans elles avaient développé le type d’amitié grâce à laquelle des mois pouvaient s’écouler avant qu’elles ne se parlent, mais à la seconde où elles se retrouvaient c’était comme si le temps n’était pas passé. Jane avait probablement entendu par Amy, ou par les ouï-dire, pour la nouvelle vie d’Emily et appelait pour l’interroger à propos du changement soudain et abrupt qu’elle avait fait.

      Emily répondit à l’appel.

      « Em ? », dit Jane, la voix tressautant et le souffle irrégulier. « Je viens juste de croiser Amy pendant mon jogging. Elle a dit que tu avais quitté New York ! »

      Emily cligna des yeux, son esprit n’était à présent plus habitué au débit de parole rapide que toutes ses amies new-yorkaises partageaient. L’idée de courir tout en ayant une conversation téléphonique était maintenant étrangère à Emily.

      « Ouais, cela fait quelque temps maintenant en fait », dit-elle.

      « De combien de temps parlons-nous ? », demanda Jayne, le bruit de ses foulées audibles sur la ligne.

      La voix d’Emily était faible et pleine d’excuses. « Hum, eh bien, environ six mois. »

      « Argh, il faut que je t’appelle plus souvent ! » Jayne était à bout de souffle.

      Emily pouvait entendre le trafic en fond, les klaxons des voitures, le bruit sourd des baskets de Jayne qui frappaient sur la chaussée. Cela évoqua une image très familière dans l’esprit d’Emily. Elle avait été cette personne il y avait seulement quelques mois de ça, toujours occupée, ne se reposant jamais, le portable vissé à l’oreille.

      « Donc quels sont les potins ? », dit Jayne. « Dis-moi tout. J’imagine que Ben ne fait plus partie du décor ? »

      Jayne, tout comme tous les amis et la famille d’Emily, n’avait jamais aimé Ben. Ils avaient été capables de voir qu’Emily avait été aveugle durant ces sept années – qu’il n’était pas si bien pour elle.

      « Vraiment sorti de ma vie », répondit Emily.

      « Et y a-t-il quelqu’un de nouveau dans le cadre ? », demanda Jayne.

      « Peut-être… », dit évasivement Emily. « Mais c’est récent et un peu instable donc je préfèrerais ne pas porter malheur en en parlant. »

      « Mais je veux tout savoir ! », cria Jayne. « Oh, ne quitte pas. J’ai un autre appel. »

      Emily patienta tandis que la ligne se faisait silencieuse. Quelques instants après, les bruits de New York remplirent de nouveau ses oreilles quand Jane se reconnecta.

      « Désolée chérie », dit-elle. « Je devais prendre ça. Le boulot. Bon écoute, Amy a dit que tu avais un B&B là-bas ou quelque chose ? »

      « Mmh mmh », répondit Emily. Elle se sentait légèrement tendue à propos du B&B, depuis qu’Amy l’avait tant décrié, le qualifiant d’idée stupide, sans mentionner tout le changement dans la vie d’Emily mal avisé.

      « Est-ce que tu as des chambres de disponibles en ce moment ? », demanda Jayne.

      Emily fut interloquée. Elle ne s’était pas attendue à une telle question. « Oui », dit-elle, pensant à la chambre maintenant abandonnée de Mr Kapowski. « Pourquoi ? »

      « Je veux venir ! », s’exclama Jayne. « C’est le week-end du Memorial Day, après tout. Et j’ai désespérément besoin de sortir de la ville. Je peux la réserver ? »

      Emily hésita. « Tu n’as pas à faire ça, tu sais. Tu peux juste venir et rester en tant que visiteur. »

      « Pas question », répondit Jayne. « Je veux le traitement complet. Serviettes propres tous les matins. Œuf et bacon au petit-déjeuner. Je veux te voir en action. »

      Emily rit. De toutes les personnes auxquelles elle avait parlé de sa jeune entreprise, Jayne était la plus encourageante.

      « Eh bien, laisse-moi t’enregistrer officiellement alors », dit Emily. « Combien de temps va durer ton séjour ? »

      « Je sais pas, une semaine ? »

      « Super », dit Emily, une petite boule de joie roulant dans le ventre. « Et quand arriveras-tu ? »

      « Demain matin », dit Jayne. « Autour de dix heures. »

      La boule de joie se fit plus grande encore. « D’accord, patiente avec moi un moment pendant que je t’inscris. »

      Un peu étourdie par l’excitation, Emily mit son téléphone en attente et se précipita jusqu’à l’ordinateur au bureau de réception, où elle se connecta au programme de réservation des chambres et entra les informations de Jayne. Elle se sentit fière d’elle-même pour avoir techniquement rempli le B&B tous les jours depuis qu’il avait ouvert, même s’il n’avait qu’une chambre à remplir, et n’avait ouvert que depuis deux jours…

      Elle retourna promptement à son téléphone, et décrocha. « Ok, tu es enregistrée pour une semaine. »

      « Très bien », dit Jayne. « Tu avais l’air très professionnelle. »

      « Merci », répondit timidement Emily.