mais il existe des différences cruciales entre les deux lignes de conduite que nous pouvons prendre. »
« Qui sont… ? » demanda Emily.
« La tutelle ou l'adoption », conclut Richard. « La tutelle, sous sa forme de base, établirait simplement une relation juridique entre Chantelle et Emily, mais cela ne mettrait pas fin à la relation juridique de Sheila avec son enfant. D’un autre côté, avec l'adoption, tous les droits et obligations de Sheila sur Chantelle cesseraient et Emily serait désormais considérée comme sa mère. En d'autres termes, elle serait un substitut à Sheila dans tous les sens juridiques. L'adoption vise à créer un foyer permanent et stable, alors nous aurions besoin que Sheila renonce à ses droits sur Chantelle et qu’elle comprenne que cela serait irrévocable. »
Emily hocha la tête, laissant les mots s’insinuer. Elle pensait à Chantelle dans sa chambre lui demandant de promettre que Sheila ne reviendrait jamais.
« Chantelle ne veut pas de relation avec sa mère », expliqua Emily.
« Mais une tutelle serait beaucoup plus facile à obtenir », contesta Richard en croisant les mains sur le bureau. « Si Sheila n'est pas prête à renoncer à ses droits sur Chantelle, ce qui d’après que vous m'avez déjà dit jusqu'ici elle ne voudrait pas faire, nous devrons prouver que Chantelle ne serait pas seulement mieux avec vous mais que Sheila est inapte à s'occuper d'elle, et que lui permettre tout contact avec sa mère lui causerait du tort. »
« Elle m'a dit maintes et maintes fois qu'elle voulait que je sois sa vraie mère » dit Emily. « Qu'elle ne veut plus jamais revoir Sheila. »
Daniel avait l'air mal à l'aise. « Je ne pense pas qu'il serait juste d’écarter entièrement Sheila. »
Richard les écouta silencieusement. « Il ne s'agit pas de droits de visite ou quelque chose comme ça. Si vous devenez la mère légale de Chantelle, cela dépendra de vous qu’elle revoie Sheila. Sauf si vous prévoyez de prendre une ordonnance restrictive sur elle. Il s'agit simplement de la légalité, de savoir qui prend les décisions concernant sa garde. »
Cela semblait trop clinique. Comment la vie et le bien-être d'un enfant pouvaient-ils être considérés comme juste une légalité ? C'était de son cœur qu’ils parlaient. Il n'y avait aucun moyen de mettre de côté ses émotions. C'était impossible.
Emily toucha légèrement la main de Daniel.
« Il faut que ce soit une adoption complète », expliqua-t-elle. « Sinon, Sheila pourrait nous l’enlever un jour. Chantelle se réveille en criant la nuit à cette perspective. Elle m'a demandé encore et encore de la protéger de Sheila. Elle m'a demandé si je pouvais être sa mère. Je sais qu'elle n'a que sept ans, mais cette fille sait ce qu’elle veut. »
Daniel finit par céder avec un seul hochement de tête triste. Emily se sentait mal pour lui, mais en même temps, elle était certaine que c'était ce qu'il fallait faire pour Chantelle.
« Nous choisissons l’adoption », confirma Daniel.
Richard opina. « Chaque état a un processus différent », expliqua-t-il. « Mais ici, dans le Maine, nous devrons déposer une demande d’abandon auprès de Sheila. Les tribunaux lui remettront les papiers, puis elle aura droit à une assistance, il y aura une réunion de médiation devant un magistrat des droits de la famille dans le but d'arriver à une résolution à l’amiable. Enfin, une date sera fixée au tribunal pour qu'un juge puisse prendre une décision. Bien sûr, si Sheila donne son consentement, les choses se passeront plus en douceur. Si elle conteste la demande, les choses prendront plus de temps car il faudra une audience sommaire, une audience incriminante, une révision judiciaire et enfin une audience de planification permanente. »
« Quels coûts cela implique-t-il ? » demanda Daniel.
« Certains » expliqua Richard. « Mais ils ne sont pas aussi élevés que ce à quoi vous vous attendriez. Nous parlons de deux cents dollars par rendez-vous, donc ce sera moins de mille dollars en tout ? »
Un millier de dollars. C’était tout ce qu'il faudrait pour faire de Chantelle leur fille. Un millier de dollars, plus des semaines et des mois d'angoisse.
« Daniel », dit Richard quelque peu solennellement, « je dois préciser que tes précédentes condamnations ne joueront pas en ta faveur. »
« Précédentes condamnations ? », balbutia Emily.
« Je te l’ai raconté », dit Daniel d'une voix étouffée et embarrassée. « Quand j'ai défendu Sheila. De son ex-mari. Tu te souviens. »
« Tu es allé devant les tribunaux pour ça ? » dit Emily. Elle n’avait pas réalisé que cela avait été si grave. Elle avait supposé que Daniel avait reçu une tape sur les doigts de la part des policiers locaux et avait été renvoyé chez lui.
Elle s’agitait sur son siège, mal à l'aise, étourdi.
Richard toussa et poursuivit. Il ne semblait pas décontenancé. Il avait probablement tout vu dans son bureau.
« Ce qui t'aiderait vraiment, Daniel, c'est si tu montrais que tu avais un emploi rémunéré. »
« C’est le cas », dit Emily. « Il travaille pour moi. »
« Il n'est pas sur votre fiche de paie, cependant », expliqua Richard. « Un travail payé de la main à la main n’a pas l’air bien. Il doit être constant. Aux trente-cinq heures de préférence. »
« D'accord » dit Daniel, l’air résolu. « Je ferais ça si ça aide. »
Emily se sentit soudain inquiète. Daniel avait toujours été disponible pour elle. C'était un partenariat cinquante-cinquante. Comment supporterait-elle le fait qu’il soit hors de la maison toute la journée ? Cela la laisserait seule pour s'occuper de Chantelle. Mais la pression pour une adoption complète venait d'elle. Si Daniel faisait à sa manière, ils prendraient la voie moins dramatique de la tutelle. C'était elle qui avait fait tout cela.
Richard referma son dossier et remit ses lunettes sur son nez. « Eh bien, les prochaines étapes sont pour moi préparer les papiers, remettre la demande légale à l’avocat de Sheila. Ensuite, je vous contacterais avec plus de nouvelles. Je dois vous avertir, cela va entraîner de l’animosité à court terme. Vous devriez vous préparer à beaucoup d’émotions. »
Daniel serra le bras d'Emily pour se rassurer.
« Nous pouvons y faire face », déclara Emily à Richard. « Pour Chantelle, nous pouvons faire face à n'importe quoi. »
CHAPITRE SEPT
Avec les mots de Richard Goldsmith qui résonnaient encore dans leurs oreilles, Emily et Daniel retournèrent à l'auberge, espérant avoir un moment de calme pour réfléchir à leur situation. Au lieu de cela, ils découvrirent que l’hôtel bourdonnait d'activité.
Les nombreux clients arrivés durant le week-end étaient en train d’être servis dans la salle à manger par Matthew, le jeune chef qu’Emily avait engagé à temps plein pour aider Parker, maintenant qu'ils avaient commencé à servir les déjeuners et dîners. Colin, qui occupait toujours la remise et prenait à présent la plupart de ses repas à l’hôtel, était parmi eux, son beau visage attirant les regards des femmes auxquelles il paraissait insensible.
Colin était surtout resté à l’écart depuis Thanksgiving. Il disparaissait toujours dans la remise dès qu'il avait fini de manger pour se replonger dans son travail. Sa beauté élégante était sujette à discussions en ville (au moins parmi les résidentes), et son humeur sombre et silencieuse ajoutait au mystère. Emily savait qu'il s'était récemment séparé de sa femme et se demandait s'il s'était plongé dans son travail (quel qu'il soit) dans une tentative d’oublier ses ennuis. Il avait toujours la tête dans son ordinateur portable. Soit cela, soit il griffonnait furieusement dans un bloc-notes, comme il le faisait maintenant à sa table dans un coin. Emily était intriguée par son