Чарльз Дарвин

De l'origine des espèces


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C'est cette puissance qui harmonise chaque membre à l'ensemble en l'appropriant à la fonction qu'il doit remplir dans l'organisme général de la nature, fonction qui est pour lui sa raison d'être» [Il paraît résulter de citations faites dans Untersuchungen über die Entwickelungs- Gesetze, de Bronn, que Unger, botaniste et paléontologiste distingué, a publié en 1852 l'opinion que les espèces subissent un développement et des modifications. D'Alton a exprimé la même opinion en 1821, dans l'ouvrage sur les fossiles auquel il a collaboré avec Pander. Oken, dans son ouvrage mystique Natur — Philosophie, a soutenu des opinions analogues. Il paraît résulter de renseignements contenus dans l'ouvrage Sur l'Espèce, de Godron, que Bory Saint Vincent, Burdach, Poiret et Fries ont tous admis la continuité de la production d'espèces nouvelles. — Je dois ajouter que sur trente-quatre auteurs cités dans cette notice historique, qui admettent la modification des espèces, et qui rejettent les actes de création séparés, il y en a vingt-sept qui ont écrit sur des branches spéciales d'histoire naturelle et de géologie.]

      Un géologue célèbre, le comte Keyserling, a, en 1853 (Bull. de la Soc. géolog., 2° série, vol. X, p. 357), suggéré que, de même que de nouvelles maladies causées peut-être par quelque miasme ont apparu et se sont répandues dans le monde, de même des germes d'espèces existantes ont pu être, à certaines périodes, chimiquement affectés par des molécules ambiantes de nature particulière, et ont donné naissance à de nouvelles formes.

      Cette même année 1853, le docteur Schaaffhausen a publié une excellente brochure (Verhandl. des naturhist. Vereins der Preuss. Rheinlands, etc.) dans laquelle il explique le développement progressif des formes organiques sur la terre. Il croit que beaucoup d'espèces ont persisté très longtemps, quelques-unes seulement s'étant modifiées, et il explique les différences actuelles par la destruction des formes intermédiaires. «Ainsi les plantes et les animaux vivants ne sont pas séparés des espèces éteintes par de nouvelles créations, mais doivent être regardés comme leurs descendants par voie de génération régulière.»

      M. Lecoq, botaniste français très connu, dans ses Études sur la géographie botanique, vol. I, p. 250, écrit en 1854: «On voit que nos recherches sur la fixité ou la variation de l'espèce nous conduisent directement aux idées émises par deux hommes justement célèbres, Geoffroy Saint-Hilaire et Goethe.» Quelques autres passages épars dans l'ouvrage de M. Lecoq laissent quelques doutes sur les limites qu'il assigne à ses opinions sur les modifications des espèces.

      Dans ses Essays on the Unity of Worlds, 1855, le révérend Baden Powell a traité magistralement la philosophie de la création. On ne peut démontrer d'une manière plus frappante comment l'apparition d'une espèce nouvelle «est un phénomène régulier et non casuel», ou, selon l'expression de sir John Herschell, «un procédé naturel par opposition à un procédé miraculeux».

      Le troisième volume du Journal ot the Linnean Society, publié le 1er juillet 1858, contient quelques mémoires de M. Wallace et de moi, dans lesquels, comme je le constate dans l'introduction du présent volume, M. Wallace énonce avec beaucoup de clarté et de puissance la théorie de la sélection naturelle.

      Von Baer, si respecté de tous les zoologistes, exprima, en 1859 (voir prof. Rud. Wagner, Zoologische-anthropologische Untersuchungen, p. 51, 1861), sa conviction, fondée surtout sur les lois de la distribution géographique, que des formes actuellement distinctes au plus haut degré sont les descendants d'un parent-type unique.

      En juin 1859, le professeur Huxley, dans une conférence devant l'Institution royale sur «les types persistants de la vie animale», a fait les remarques suivantes: «Il est difficile de comprendre la signification des faits de cette nature, si nous supposons que chaque espèce d'animaux, ou de plantes, ou chaque grand type d'organisation, a été formé et placé sur la terre, à de longs intervalles, par un acte distinct de la puissance créatrice; et il faut bien se rappeler qu'une supposition pareille est aussi peu appuyée sur la tradition ou la révélation, qu'elle est fortement opposée à l'analogie générale de la nature. Si, d'autre part, nous regardons les types persistants au point de vue de l'hypothèse que les espèces, à chaque époque, sont le résultat de la modification graduelle d'espèces préexistantes, hypothèse qui, bien que non prouvée, et tristement compromise par quelques-uns de ses adhérents, est encore la seule à laquelle la physiologie prête un appui favorable, l'existence de ces types persistants semblerait démontrer que l'étendue des modifications que les êtres vivants ont dû subir pendant les temps géologiques n'a été que faible relativement à la série totale des changements par lesquels ils ont passé.»

      En décembre 1859, le docteur Hooker a publié son Introduction to the Australian Flora; dans la première partie de ce magnifique ouvrage, il admet la vérité de la descendance et des modifications des espèces, et il appuie cette doctrine par un grand nombre d'observations originales.

      La première édition anglaise du présent ouvrage a été publiée le 24 novembre 1859, et la seconde le 7 janvier 1860.

      INTRODUCTION

      Les rapports géologiques qui existent entre la faune actuelle et la faune éteinte de l'Amérique méridionale, ainsi que certains faits relatifs à la distribution des êtres organisés qui peuplent ce continent, m'ont profondément frappé lors mon voyage à bord du navire le Beagle [La relation du voyage de M. Darwin a été récemment publiée en français sous le titre de: Voyage d'un naturaliste autour du monde, 1 vol, in-8°, Paris, Reinwald], en qualité de naturaliste. Ces faits, comme on le verra dans les chapitres subséquents de ce volume, semblent jeter quelque lumière sur l'origine des espèces — ce mystère des mystères — pour employer l'expression de l'un de nos plus grands philosophes. À mon retour en Angleterre, en 1837, je pensai qu'en accumulant patiemment tous les faits relatifs à ce sujet, qu'en les examinant sous toutes les faces, je pourrais peut-être arriver à élucider cette question. Après cinq années d'un travail opiniâtre, je rédigeai quelques notes; puis, en 1844, je résumai ces notes sous forme d'un mémoire, où j'indiquais les résultats qui me semblaient offrir quelque degré de probabilité; depuis cette époque, j'ai constamment poursuivi le même but. On m'excusera, je l'espère, d'entrer dans ces détails personnels; si je le fais, c'est pour prouver que je n'ai pris aucune décision à la légère.

      Mon oeuvre est actuellement (1859) presque complète. Il me faudra, cependant, bien des années encore pour l'achever, et, comme ma santé est loin d'être bonne, mes amis m'ont conseillé de publier le résumé qui fait l'objet de ce volume. Une autre raison m'a complètement décidé: M. Wallace, qui étudie actuellement l'histoire naturelle dans l'archipel Malais, en est arrivé à des conclusions presque identiques aux miennes sur l'origine des espèces. En 1858, ce savant naturaliste m'envoya un mémoire à ce sujet, avec prière de le communiquer à Sir Charles Lyell, qui le remit à la Société Linnéenne; le mémoire de M. Wallace a paru dans le troisième volume du journal de cette société. Sir Charles Lyell et le docteur Hooker, qui tous deux étaient au courant de mes travaux — le docteur Hooker avait lu l'extrait de mon manuscrit écrit en 1844 — me conseillèrent de publier, en même temps que le mémoire de M. Wallace, quelques extraits de mes notes manuscrites.

      Le mémoire qui fait l'objet du présent volume est nécessairement imparfait. Il me sera impossible de renvoyer à toutes les autorités auxquelles j'emprunte certains faits, mais j'espère que le lecteur voudra bien se fier à mon exactitude. Quelques erreurs ont pu, sans doute, se glisser dans mon travail, bien que j'aie toujours eu grand soin de m'appuyer seulement sur des travaux de premier ordre. En outre, je devrai me borner à indiquer les conclusions générales auxquelles j'en suis arrivé, tout en citant quelques exemples, qui, je pense, suffiront dans la plupart des cas. Personne, plus que moi, ne comprend la nécessité de publier plus tard, en détail, tous les faits sur lesquels reposent mes conclusions; ce sera l'objet d'un autre ouvrage. Cela est d'autant plus nécessaire que, sur presque tous les points abordés dans ce volume, on peut invoquer des faits qui, au premier abord, semblent tendre à des conclusions absolument contraires à celles que j'indique. Or, on ne peut arriver à un résultat satisfaisant qu'en examinant les deux côtés de la question