George Sand

Cadio


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       George Sand

      Cadio

      Publié par Good Press, 2021

       [email protected]

      EAN 4064066082918

       PREMIÈRE PARTIE

       DEUXIÈME PARTIE

       TROISIÈME PARTIE

       QUATRIÈME PARTIE

       CINQUIÈME PARTIE

       SIXIÈME PARTIE

       SEPTIÈME PARTIE

       HUITIÈME PARTIE

       NEUVIÈME PARTIE

       DIXIÈME PARTIE

       ONZIÈME PARTIE

       Table des matières

      Au printemps, 1793.--Au château de Sauvières, en Vendée. 1--Un grand salon riche.--Une grande salle avec escalier au fond.

      SCÈNE PREMIÈRE.--Le comte DE SAUVIÈRES, ROXANE, LOUISE, M. DE LA TESSONNIÈRE, MARIE HOCHE. La Tessonnière joue aux cartes avec Louise, le comte lit un journal, Roxane parfile, Marie brode.

      LE COMTE. Non, ma soeur, non! on ne rétablira pas la monarchie avec une poignée de paysans.

      ROXANE. Une poignée! ils sont déjà plus de vingt mille sous les armes.

      LE COMTE. Fussent-ils cent mille, ils n'y pourront rien. Le roi n'est plus!--Louis XVI emporte notre dernier espoir dans sa tombe.

      LOUISE. Il n'a pas même une tombe!

      ROXANE. La royauté est immortelle. Le dauphin règne!

      LE COMTE. Dans un cachot!

      ROXANE. Délivrons-le! (Louise, émue, semble approuver sa tante. La Tessonnière donne des signes d'impatience quand elle se distrait de son jeu.)

      LE COMTE. Le délivrer, pauvre enfant! Tenter cela serait le sûr moyen de hâter sa mort. Ah! les émigrés auront éternellement celle du roi sur la conscience!

      ROXANE. Alors, vous ne voulez rien faire? C'est plus commode, mais c'est lâche! Ah! ma nièce, si nous étions des hommes, souffririons-nous ce qui se passe?

      LE COMTE. Louise, réponds, mon enfant: que ferais-tu? (Louise baisse la tête et ne répond pas.) Ton silence semble me condamner... Pourtant... tu sais que j'ai pris des engagements...

      LOUISE, (soupirant.) Je sais, mon père!

      LA TESSONNIÈRE, (avec humeur.) Eh! vous mettez un valet sur un neuf, ça ne va pas. (Marie prend la place de Louise et continue la partie avec la Tessonnière.)

      ROXANE, (à son frère.) Vos engagements, vos engagements! Il ne fallait pas les prendre.

      LE COMTE. Je les ai pris; donc, ils existent. Vous-même m'avez approuvé quand j'ai juré de défendre notre district envers et contre tous, en acceptant le commandement de la garde nationale. (S'adressant à Louise.) Suis-je le seul qui ait agit de la sorte? n'était-ce pas le mot d'ordre de notre parti?

      ROXANE. Le mot d'ordre, oui, à la condition de s'en moquer plus tard.

      LE COMTE. Je n'ai pas accepté, moi, le sous-entendu de ce mot d'ordre.

      ROXANE. Ah! tenez! si vous n'aviez pas fait vos preuves à l'armée du roi, du temps qu'il y avait un roi et une armée, je croirais que vous êtes un poltron! Oui, prenez-le comme vous voudrez... je dis un...

      LOUISE. Ma tante!...

      LE COMTE. Cela ne m'offense pas, mon enfant! Devant les arrêts de sa propre conscience, un homme peut trembler et reculer.

      ROXANE. Ainsi vous reculez? c'est décidé? Heureusement, notre neveu Henri... Ah! celui-là,... ton fiancé, Louise, c'est l'espoir de la famille!

      LOUISE. Vous croyez que Henri...?

      MARIE. Oui, certes, M. Henri vous reviendra!

      LE COMTE. Il le peut, lui! Enrôlé par force, pour échapper à la terrible liste des suspects, il a le droit de déserter.

      LOUISE. Ah! vous l'approuveriez? En effet, ce serait son devoir! Espérons qu'il le comprendra. Quand il saura dans quelle situation vous vous trouvez, entre la bourgeoisie que vous êtes forcé de protéger, et les paysans qui menacent de se tourner contre vous, il accourra pour prendre un commandement dans l'armée vendéenne, et il vous fera respecter de tous les partis.

      LE COMTE. Ma pauvre Louise, tu crois donc aussi, toi, au succès de l'insurrection?

      LOUISE. Comment en douter quand on voit tout marcher à la guerre sainte, jusqu'aux prêtres, aux femmes et aux enfants? Que cet élan est beau, et comme le coeur s'élance vers cette croisade!...

      ROXANE. Vive-Dieu, Louise! tu as raison: cela transporte, cela enivre! Il y a des moments où j'ai envie de prendre des pistolets, de chausser des éperons, de sauter sur un cheval, et de donner la chasse aux vilains de la province!

      LE COMTE. Vous?

      ROXANE. Oui, moi! moi qui vous parle, je sens bouillir dans mes veines le sang de ma race!

      LE COMTE. Pauvre Roxane! Gardez un peu de cette vaillance pour les événements qui menacent, car je crains bien qu'au premier coup de fusil...

      ROXANE. Vous ne me connaissez pas! je suis capable... (A Marie, lui mettant familièrement les mains sur les épaules.) N'est-ce pas, Marie? dites; mais j'oublie toujours que vous ne pensez pas comme nous!

      MARIE. Oubliez-le, si cela vous fâche; je ne vous le rappellerai jamais!

      LOUISE. On sait cela, bonne Marie! mais, au fond... (bas) tu approuves mon père?

      MARIE, (aussi à voix basse.) Ce qu'il dit est si noble, ce qu'il pense si respectable!... (Louise rêve.)

      MÉZIÈRES, (entrant.) Une lettre pour M. le comte.

      LOUISE. D'Henri peut-être! Oui! (Donnant la lettre au comte.) Lisez vite, mon père!

      MÉZIÈRES. Je voyais bien ça... au timbre!... Puis-je rester pour savoir...? (Louise fait un signe affirmatif.)

      ROXANE, (au comte.) Il arrive, n'est-ce pas? Dites donc!

      LE COMTE, (qui parcourt