Newcomb. Et en dépit de sa petite taille, Mackenzie sentit qu’elle avait une grande importance.
***
Il était une heures cinq lorsqu’ils arrivèrent finalement au motel. Mackenzie était épuisée mais également revigorée par l’énigme de la poupée et de la petite théière. Une fois dans la chambre, elle prit un court moment pour retirer ses vêtements de travail et enfiler un T-shirt et un short de sport. Elle mit son ordinateur à charger tandis qu’Ellington se changeait pour se mettre à l’aise. Elle se connecta à sa boîte mail et vit que McGrath avait assigné à un agent la tâche de leur envoyer tous les documents qu’ils possédaient sur les meurtres des espaces d’entreposage personnel de Salem, dans l’Oregon, il y a huit ans.
- Qu’est-ce que tu fais ? demanda Ellington en s’approchant derrière elle. Il est tard et demain, une journée interminable nous attend.
Elle l’ignora et demanda :
- Y avait-il le moindre détail dans l’affaire de l’Oregon ayant un lien avec ça ? Une poupée, une théière… quelque chose dans le genre ?
- Honnêtement, je ne m’en souviens pas. Comme l’a dit McGrath, j’étais seulement en charge clôturer l’affaire. J’ai interrogé quelques témoins, mis de l’ordre dans les rapports et les documents. Si des éléments similaires sont apparus dans l’enquête, ils ne m’ont pas sauté aux yeux. Je ne suis pas prêt à affirmer que les affaires sont connectées. Oui, elles sont étrangement similaires, mais pas identiques. Pourtant… nous ne perdons rien à y jeter un œil. Nous pourrions peut-être aller au commissariat de Salem pour voir si l’un des policiers qui a travaillé sur le dossier se souvient d’un détail du genre.
Mackenzie le croyait sur parole mais ne put s’empêcher de parcourir plusieurs documents avant de s’abandonner au désir de dormir. Elle sentit la main d’Ellington sur son épaule puis son visage à côté du sien.
- Suis-je paresseux si je me mets au lit ?
- Non. Suis-je beaucoup trop obsessionnelle si je ne le fais pas ?
- Non. Tu es seulement très dévouée à ton travail.
Il l’embrassa sur la joue et se laissa tomber sur l’unique lit de la chambre.
La possibilité de le rejoindre était tentante – pas pour des activités extracurriculaires, seulement pour profiter de quelques heures de sommeil avant de se laisser emporter par le rythme frénétique du lendemain. Mais elle sentit qu’elle devait au moins trouver quelques pièces supplémentaires du puzzle, même si elles étaient enterrées dans les tréfonds d’un dossier vieux de huit ans.
Au premier coup d’œil, il n’y avait rien. Cinq personnes avaient été tuées, les corps avaient été retrouvés dans des centres d’entreposage. L’un de box contenait des cartes de baseball d’une valeur excédant les dix mille dollars et un autre renfermait une collection macabre d’armes du Moyen-Âge. La police avait interrogé sept personnes en relation avec les meurtres mais n’avait prononcé aucune arrestation. La théorie élaborée par la police et le FBI voulait que le meurtrier enlève ses victimes avant de les forcer à ouvrir leurs boxes d’entreposage. D’après les premiers rapports, il semblait que l’assassin ne volait rien des boxes, même s’il était évidemment impossible d’avoir une certitude sur la question.
D’après les observations de Mackenzie, aucun élément sortant de l’ordinaire n’avait été retrouvé sur les scènes de crime. Les dossiers contenaient des photos des scènes de crime et des cinq victimes. Trois des locaux d’entreposage étaient extrêmement désordonnés, parce qu’ils n’étaient pas obsessionnellement organisés comme celui d’Elizabeth Newcomb.
Deux des photos des scènes de crime étaient remarquablement claires. L’une de la seconde victime, l’autre de la cinquième. Les deux boxes étaient dans un état que Mackenzie était tentée de qualifier de chaos organisé, il y avait des piles d’objets çà et là, au petit bonheur la chance.
En regardant la photo de la seconde scène de crime, Mackenzie se concentra sur le fond du box, en zoomant autant qu’elle pouvait tant que l’image restait nette. Presque au centre de la pièce, au sommet de trois cartons empilés mais semblant sur le point de s’effondrer, elle crut repérer un détail intéressant. On aurait dit une sorte de pichet, pour de l’eau ou de la limonade. Il était posé sur une assiette. Même s’il y avait plusieurs objets sans rapport les uns avec les autres, ceux-là semblaient avoir été soigneusement placés au centre du box.
Elle les fixa jusqu’à ce que ses yeux commencent à brûler, sans parvenir à obtenir de certitude. Même si ses chances étaient minces, elle ouvrit une nouvelle fenêtre pour envoyer un mail à deux agents qui travaillaient rapidement et efficacement – deux agents qui, pensa-t-elle soudain, étaient invités à son mariage avec Ellington : les Agents Yardley et Harrison.
Elle ajouta les fichiers reçus en pièce-jointe et écrivit un court message : L’un de vous pourrait-il chercher dans les dossiers liés à ces affaires pour voir si quelqu'un a rédigé un inventaire de ce qui se trouvait dans les boxes d’entreposage ? Peut-être demander aux propriétaires des espaces d’entreposage personnel.
Certaine qu’il ne lui restait pas grand chose à faire, Mackenzie s’autorisa finalement à se mettre au lit. Parce qu’elle était tellement épuisée et que le poids de cette journée l’écrasa soudain, elle s’endormit en moins de deux minutes, à l’instant où sa tête toucha l’oreiller.
Même lorsque l’image inquiétante de la poupée du local d’Elizabeth Newcomb fit surface dans son esprit, elle parvint à l’ignorer – presque avec succès – et se laissa envahir par le sommeil.
CHAPITRE DIX
Mackenzie ne fut absolument pas surprise de se réveiller à six heures et demie et de découvrir que l’Agent Harrison lui avait répondu. C’était presque un gourou de la recherche et il avait rapidement appris à manier les dossiers, les fichiers et d’énormes quantités de données. Son mail contenait deux pièces-jointes et un message direct, comme toujours.
Les deux pièces-jointes sont des inventaires menés à bien par le FBI. C’est tout ce dont nous disposons parce que les familles de deux autres victimes ont refusé que le Bureau passe en revue les objets de leurs espaces d’entreposage personnel. Il manque le cinquième parce que le propriétaire du complexe a vendu le contenu du box aux enchères trois jours après la mort de la victime. Ça semble de très mauvais goût mais la victime n’avait pas de famille pour récupérer ses affaires.
J’espère que ça te sera utile. Tiens-moi au courant si tu as besoin de quelque chose de plus spécifique.
Mackenzie ouvrit la pièce-jointe et trouva une liste simplifiée sous format Word. Le premier document comptait sept pages. Le second littéralement trente-six. Le document le plus long était un inventaire d’un local appartenant à Jade Barker. Le nom rappela instantanément quelque chose à Mackenzie. Elle chercha les images de la scène de crime parmi les documents originaux et vit que le local le plus désordonné appartenait à Jade Barker – celui qui contenait l’assiette étrange et le pichet installés au milieu de l’image.
Mackenzie entreprit une recherche rapide dans le document et trouva les deux éléments listés à la page deux.
Pichet de dînette.
Assiette (jouet en plastique).
Derrière elle, Ellington s’habillait. Alors qu’il boutonnait sa chemise, il s’approcha d’elle et regarda l’écran.
- Putain, dit-il. Ils t’ont donné ce que tu voulais, n’est-ce pas ?
- Oui. (Elle désigna les deux éléments, puis elle considéra quelque chose pendant un moment avant de demander). Où se trouve Salem exactement, dans l’Oregon ?
- Au nord de l’état.