bureau.
– J’espère que je ne serai au chômage que peu de temps, dit Jessie. La semaine prochaine, j’ai des entretiens d’embauche à plusieurs universités pour des postes d’enseignante à l’automne. Entre temps, j’essaie d’apprécier de ne pas avoir tant de choses à faire.
Aucune des deux femmes ne mentionna les raisons principales pour lesquelles elle n’avait pas besoin de se presser à chercher un travail. Son divorce avait été lucratif. Avant d’être condamné, Kyle avait aidé à gérer une activité prospère de gestion de fortunes, donc, Jessie aurait quand même gagné beaucoup d’argent lors de son divorce quoi qu’il arrive, mais le fait que Kyle ait tenté de la faire accuser de son propre assassinat puis de la tuer avait permis à Jessie de gagner un maximum.
En dehors de ça, elle avait aussi reçu un héritage généreux de la part de ses parents adoptifs, qui avaient été assassinés par son père biologique tueur en série quelques années auparavant. L’avocat de Garland lui avait aussi dit qu’elle devrait s’attendre à recevoir un cadeau substantiel quand le testament de ce dernier serait lu cette semaine. Jessie se sentait coupable de vivre confortablement à cause de tant de douleur et de souffrances mais, comme il fallait qu’elle s’occupe de Hannah, qu’elle paye des factures médicales toujours plus élevées et des équipements de sécurité domestique complexes, elle avait accepté cet état de choses.
Avant qu’elle n’ait pu parler plus longtemps de ses perspectives professionnelles, la porte de sa chambre s’ouvrit. Elle vit sortir une Hannah aux yeux pris par le sommeil, vêtue d’une culotte et d’un débardeur et décoiffée par la nuit.
– Vous vous ressemblez comme deux gouttes d’eau, dit Kat d’un air narquois.
Malgré la gentillesse de la pique de son amie, Jessie ne put nier que c’était vrai. Même sans les dix centimètres supplémentaires que ses cheveux en bataille lui offraient, Hannah, qui mesurait un mètre soixante-quinze, était presque aussi grande que Jessie. Elles avaient le même corps mince et athlétique. De plus, quand Hannah finirait par ouvrir complètement les yeux, elle regarderait Jessie et Kat avec le même regard vert et intense que Jessie.
– Comment ça va, la Belle au bois dormant ? demanda Jessie.
– Quels projets pour aujourd’hui, princesse ? ajouta Kat.
Hannah les regarda toutes les deux d’un air renfrogné avant d’entrer dans la salle de bains et de refermer la porte sans dire un seul mot.
– Elle est adorable, dit sèchement Kat.
– Un vrai rayon de lumière, convint Jessie d’un ton sarcastique. Elle est maussade parce que ses vacances d’été sont presque finies. Elle doit aller à l’école d’été la semaine prochaine et ça ne lui plaît pas.
– Il ne lui reste qu’une semaine à se prélasser, fit remarquer Kat. Pauvre chérie. J’aimerais pouvoir en faire autant.
– Qu’as-tu de prévu, aujourd’hui ? demanda Jessie.
– Rien de passionnant. Je dois relire une documentation judiciaire ce matin. Ensuite, un couple riche veut que je découvre qui vend de la drogue à leur fils. Je suis loin d’être Philip Marlowe, le grand détective.
– Tu veux de l’aide ? Je pourrais lire les documents et —
– Non, ma belle, interrompit Kat. Tu es censée te reposer aussi bien le corps que le cerveau. Va marcher, regarde un mauvais film mais ne travaille pas.
Alors que Jessie allait répondre, son téléphone sonna. À présent, elle connaissait bien ce numéro. Elle répondit immédiatement.
– Jessie Hunt à l’appareil.
– Bonjour, Mme Hunt. Je suis l’infirmière Janelle de l’Unité des Soins Intensifs du Centre Médical. Le Dr Badalia aimerait que vous passiez pour qu’il puisse vous parler. Quand êtes-vous disponible ?
– Je serai là dans quinze minutes, dit-elle avant de raccrocher.
Elle regarda Kat, qui semblait comprendre de quoi il s’agissait.
– Habille-toi, dit son amie. Je te verse un café et je te fais griller un bagel. Tu pourras partir dans cinq minutes.
– Et Hannah ?
– Ne te soucie pas d’elle. Je la surveillerai ce matin. Quand je devrai partir, Instagram pourra prendre le relais.
Jessie cria « Merci ! » alors qu’était déjà au milieu du couloir et se dirigeait vers sa chambre.
CHAPITRE TROIS
L’hôpital s’assurait que la chambre de Ryan reste sombre et fraîche. Le sifflement du respirateur artificiel produisait un rythme régulier. Jessie aurait presque pu le trouver apaisant si elle avait pu oublier pourquoi il était là. L’infirmière lui avait dit que le Dr Badalia arriverait bientôt. En attendant, Jessie examina Ryan.
Il avait meilleure mine qu’avant. Son visage était un peu moins pâle que lors de la dernière visite de Jessie et il avait un teint moins cireux. Si elle plissait les yeux, elle pouvait imaginer qu’il était juste assoupi. Il avait encore son charme ténébreux et, avec le drap qui le couvrait jusqu’au cou, on ne voyait pas que le corps qu’il avait entretenu de son mieux avait déjà commencé à s’atrophier.
Cependant, c’était juste une illusion. Guère plus de deux semaines auparavant, Ryan Hernandez avait été le meilleur inspecteur de la SSH, la Section Spéciale Homicides de la Police de Los Angeles, celle qui enquêtait sur les affaires bien en vue ou très suivies par les médias, souvent avec plusieurs victimes et des tueurs en série. Maintenant, il était allongé dans un lit d’hôpital, sans défense, poignardé à la poitrine par l’ex-mari de Jessie pendant qu’il était chez eux. C’était un souvenir trop lourd et elle l’écarta de ses pensées.
Le Dr Badalia arriva à la porte et elle se leva pour aller le retrouver dans le hall. C’était un homme grand et mince qui approchait de la quarantaine. Comme il avait toujours une expression austère, Jessie ne pouvait jamais dire s’il allait lui annoncer de bonnes ou de mauvaises nouvelles.
– Merci d’être venue, Mme Hunt, dit-il doucement.
– Pas de problème. Avez-vous des nouvelles ?
– Oui. Comme vous le savez, nous avons sorti Ryan de son coma artificiel la semaine dernière. La nuit dernière, pour la première fois, il a un peu réagi aux stimuli. Donc, nous avons légèrement réduit sa sédation pour voir si nous pouvions répéter l’expérience. Nous avons réussi. Il a pu ouvrir les yeux et répondre à quelques questions fermées en clignant des yeux. Nous avons pu lui expliquer brièvement sa situation, pourquoi il était en respiration artificielle et ainsi de suite.
D’abord, Jessie ne put rien dire. L’émotion du moment la submergea de manière inattendue et une boule lui remplit la gorge. Ce ne fut qu’à ce moment qu’elle se rendit compte à quel point elle avait refoulé son anxiété et sa terreur pendant toutes ces semaines. Ce qui ne s’était introduit dans sa conscience qu’à ses moments de fatigue ou d’énervement venait maintenant de s’y déverser en force.
– Vous êtes sérieux ? dit-elle. C’est fantastique. Pourquoi ne m’a-t-on pas appelée ?
– Il était très tard, après minuit. De plus, honnêtement, l’effort a semblé l’épuiser. Au bout d’environ six minutes, il s’est endormi.
– Oh. Et ce matin ? S’est-il réveillé, aujourd’hui ?
– En fait, nous avons diminué le niveau de sédation il y a environ une heure parce que nous voudrions réessayer. C’est pour cela que nous vous avons appelée. J’espère que, s’il reprend conscience et si vous êtes là, il pourra communiquer un peu plus.
– Ça serait formidable, dit Jessie. On le fait dans combien de temps ?
Le Dr Badalia jeta un coup d’œil dans la chambre.
– Pourquoi