qui s'empara du monde entier quand on connut cette ascension sensationnelle. La seconde sortie eut lieu le 2 septembre, en présence du général Campenon, ministre de la guerre, mais le vent étant assez fort, l'aérostat dut s'arrêter à Velizy, à 5 kilomètres de Meudon. Le 8 novembre, nouvelle sortie avec MM. Renard et Krebs jusqu'à Boulogne et Billancourt. Trois ascensions eurent lieu en 1885, le 25 août, les 22 et 23 septembre, et ce fut tout. La France n'était du reste qu'un aéronat devant servir à faire des démonstrations et, sous ce rapport, la réussite fut complète, puisqu'il réalisa une vitesse de 6 m. 50 qui n'avait jamais été atteinte jusqu'alors.
L'oeuvre des deux officiers n'en serait pas restée là; malheureusement, le colonel mourut et Krebs quitta l'armée pour entrer dans l'industrie.
Voyons, maintenant, ce que fit l'initiative privée.
Il n'était pas encore question du fameux prix Deutsch, que déjà M. Santos-Dumont s'était lancé dans le maniement des dirigeables. C'est, en effet, le 18 septembre 1898 que le Santos-Dumont n°1 fut gonflé pour la première fois au Jardin d'acclimatation. Ce premier ballon fut d'ailleurs déchiré avant de partir, par suite d'une fausse manoeuvre des aides qui tenaient les cordes de départ.
Le 11 mai 1899, le Santos-Dumont n° 2 faisait sa première sortie, sortie également malheureuse. Disons de suite ici, que les ballons de M. Santos-Dumont manquaient totalement d'équilibre et de rigidité. Le 13 novembre 1899, le n° 3 part du parc d'aérostation de Vaugirard et, pour la première fois, Santos-Dumont contourne la tour Eiffel.
Mais, un beau matin, les journaux annoncent qu'un généreux inconnu met à la disposition de l'Aéro-Club de France une somme de 100.000 francs pour être attribuée au premier aéronaute qui, partant à bord d'une machine aérienne quelconque, du parc d'aérostation de l'Aéro-Club, doublerait la tour Eiffel et reviendrait à son point de départ sans toucher terre, dans l'espace de trente minutes au maximum.
L'annonce de cette libéralité extraordinaire de M. Henry Deutsch de la Meurthe eut un retentissement immense et eut pour effet immédiat d'attirer l'attention du public sur les essais de M. Santos-Dumont.
M. Santos-Dumont resta seul concurrent. Après divers essais avec ses n° 4 et 5—dernier modèle pourvu enfin de la poutre armée assurant la rigidité du navire aérien—l'intrépide aéronaute, à bord de son n° 6, parvint, le 19 octobre 1901, à accomplir le trajet réglementaire.
Pendant que le sportsman Santos-Dumont multipliait, avec ses nombreux modèles d'aéronat, ses prouesses périlleuses, un ingénieur, M. Henri Julliot, directeur de la raffinerie de MM. Lebaudy, poursuivait l'étude méthodique et approfondie de tous les éléments de la question du ballon dirigeable. M. Julliot eut la chance de voir MM. Lebaudy s'intéresser vivement à ses projets, et, le 13 novembre 1902, le Lebaudy, s'élançant dans les airs, se mit à évoluer avec l'aisance la plus parfaite dans tous les sens et toutes les façons, grâce à l'habile pilote Surcouf.
Tout avait été si bien prévu, les calculs avaient été si exacts, que M. Julliot ne vit à modifier, après les premiers essais, que des points d'ordre secondaire; il perfectionna, mais n'eut rien à changer à l'organisation générale qui est restée en 1910 la même qu'en 1902.
Les principales transformations, d'ailleurs prévues, consistèrent dans le placement d'un gouvernail et celui de la penne de flèche. Avec l'année 1904 cesse la période des essais et le Lebaudy prouve surabondamment sa valeur comme appareil de navigation aérienne.
Mais en présence des résultats obtenus, MM. Lebaudy et Julliot songèrent à faire mieux et plus utile, à perfectionner l'outil suffisamment pour qu'il pût rendre de réels et importants services aux armées.
C'est alors que MM. Lebaudy proposèrent au ministre de la guerre de faire contrôler et diriger toutes les ascensions de 1905 par une commission d'officiers spécialistes; le ministre accepta.
Après avoir fait des ascensions de durée, de longueur, d'altitude, etc., le Lebaudy accomplissait, le 12 octobre 1905, le remarquable voyage de Toul à Nancy et retour; le 8 décembre, il faisait partie de l'armée.
En février 1906, le ministre avait demandé à MM. Lebaudy de se charger de la confection d'un nouvel aéronat et, le 15 novembre, le dirigeable militaire Patrie faisait sa première sortie.
Le 15 décembre 1906, le Patrie couronnait, par une sensationnelle prouesse, la série de ses expériences militaires.
Parti, à 10 heures du matin, de la plaine de Moisson, il atterrissait à 11 h. 12 dans le parc de l'établissement central de l'aérostation militaire, à Chalais-Meudon après avoir franchi une distance de 52 kilomètres à vol d'oiseau.
Tout le monde a dans l'esprit la fin malheureuse du Patrie, qui, le 29 novembre 1907, c'est-à-dire six jours après son magnifique voyage Meudon-Verdun, 230 kilomètres en 6 h. 40, s'échappait par un vent violent et allait se perdre dans l'Atlantique.
Quand la catastrophe fut connue, M. Deutsch de la Meurthe offrit au ministère de la guerre français son ballon Ville de Paris, construit par M. Surcouf, et qui venait d'effectuer de magnifiques sorties.
Ce dirigeable cube 3.200 mètres; sa longueur est 62 mètres; son empennage est constitué par un faisceau cruciforme de huit tubes gonflés d'hydrogène.
C'est par un froid rigoureux et un vent continuellement contraire que le 15 janvier le Ville de Paris quitta Sartrouville pour gagner Verdun, sous la conduite de son pilote, M. Kapferer.
Malgré tous les incidents qui se produisirent au cours de ce voyage, la distance de 240 kilomètres fut franchie en 9 h. 50.
Le 24 juin 1908, à 5 heures du matin, le République, troisième unité de cette flottille aérienne militaire, s'élevait pour la première fois du hangar de Moisson et montrait sa supériorité sur les types l'ayant précédé. Mais, décidément le mauvais sort était sur les créations de l'ingénieur Julliot. Le République eut la même funeste destinée que le Patrie. Pendant son voyage de retour des manoeuvres, de La Palisse à Moisson, une branche d'hélice se détacha subitement de son moyeu et vint éventrer l'enveloppe qui se vida instantanément de son gaz. Les quatre aéronautes militaires qui montaient le dirigeable furent précipités à terre et tués sur le coup.
En même temps que la France, les autres nations se préoccupaient de la question de la direction des aéronats. On a conservé le souvenir des dramatiques ascensions du Pax, de l'infortuné brésilien Severo et de Bradsky, qui, tous deux, vinrent faire leurs expériences en France.
Le premier avait construit un ballon dont quelques détails étaient assez ingénieux, mais qui péchait par plusieurs gros défauts. Le principal consistait dans le placement du moteur à explosion à 2 m. 50 à peine de la soupape de l'échappement des gaz, de sorte que l'hydrogène, dilaté par la diminution de pression due à la montée de l'aéronat, devait inévitablement, en s'échappant, venir lécher le moteur et s'enflammer à son contact. C'est ce qui se produisit dès la première ascension, le 12 mai 1902; le ballon éclata au bout d'un quart d'heure, et les deux aéronautes qui le montaient, Severo et Sache, vinrent se broyer sur le sol de l'avenue du Maine.
La même année, M. de Bradsky eut le même sort, ainsi que son aide, Morin, le 13 octobre, auprès de Stains.
C'est l'Allemagne qui, après la France, semble s'être le plus préoccupée de la question des dirigeables.
Citons les tentatives plus ou moins heureuses de Haenlein, de Mayence en 1872; du docteur Woelfert en 1897; de David Schwarz en 1898 et arrivons au Zeppelin.
Le général bavarois comte de Zeppelin avait, depuis 1898, dressé des plans et fait des expériences dans lesquelles il avait sacrifié toute sa fortune. En 1900, une souscription nationale