Морис Леблан

Тайны Арсена Люпена. Уровень 1 / Les Confi dences d’Arsène Lupin


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Charles?

      – Charles vivait dans la retraite la plus absolue[133]. Il ne quittait pas sa chambre.

      – Jamais?

      – Une fois l’an, Charles d’Ernemont descendait, suivait exactement le chemin que son père avait suivi, traversait le jardin, et s’asseyait tantôt sur les marches de la rotonde, dont vous voyez ici le dessin, tantôt sur la margelle de ce puits. Ce jour-là, c’était le 15 avril, jour de l’anniversaire de l’arrestation.»

      M. Valandier ne souriait plus.

      Après un instant de réflexion, Lupin demanda:

      «Et depuis la mort de Charles?

      – Depuis cette époque, reprit le notaire avec une certaine solennité, depuis bientôt cent ans, les héritiers de Charles et de Pauline d’Ernemont continuent le pèlerinage le quinze avril. Ils attendent. Ils attendent le quinze avril, et lorsque le quinze avril est arrivé, ils attendent qu’un miracle se produise.»

      Un nouveau silence, et Lupin reprit:

      «Votre opinion, Maître Valandier?

      – Mon opinion est qu’il n’y a rien.

      – Cependant les tableaux?

      – Oui, évidemment. Mais tout de même[134], est-ce une preuve suffisante?

      – Vous avez parlé de trois tableaux? Et chacun d’eux portait la même date?

      – Oui, inscrite par Charles d’Ernemont… La même date,

      15-4-2, c’est-à-dire le 15 avril, an II, selon le calendrier révolutionnaire, puisque l’arrestation eut lieu en avril 1794.

      – Ah! bien, parfait… dit Lupin… le chiffre 2 signifie…»

      Il demeura pensif durant quelques instants et reprit:

      «Encore une question, voulez-vous? Personne ne s’est jamais offert pour résoudre ce problème?»

      Me Valendier leva les bras.

      «Que dites-vous là s’écria-t-il. Toute personne étrangère qui voulait opérer des recherches devait, au préalable, déposer une certaine somme.

      – Quelle somme?

      – Cinq mille francs. En cas de réussite, le tiers des trésors revient à l’individu. En cas d’insuccès, le dépôt reste acquis aux héritiers. Comme ça, je suis tranquille.

      – Voici les cinq mille francs.»

      Le notaire sursauta.

      «Hein! que dites-vous?

      – Je dis, répéta Lupin en sortant cinq billets de sa poche, je dis que voici le dépôt de cinq mille francs.

      – C’est sérieux? articula Me Valandier.

      – Absolument sérieux.

      – Pourtant je ne vous ai pas caché mon opinion. Toutes ces histoires invraisemblables ne reposent sur aucune preuve.

      – Je ne suis pas de votre avis[135], déclara Lupin.»

      Le notaire le regarda comme on regarde un monsieur dont la raison n’est pas très saine.

      «Si vous changez d’avis, ajouta-t-il, je vous prie de m’en avertir huit jours d’avance.»

      On se quitta. Aussitôt dans la rue, je m’écriai:

      «Vous savez donc quelque chose?

      – Moi? répondit Lupin, rien du tout. Et c’est là, précisément, ce qui m’amuse.

      – Mais il y a cent ans que l’on cherche!

      – Il s’agit moins de chercher que de réfléchir. Or j’ai trois cent soixante-cinq jours pour réfléchir.»

      Puis il y eut toute une période durant laquelle je n’eus pas l’occasion de le voir[136].

      De fait, le matin du 15 avril arriva, et j’avais fini de déjeuner que Lupin n’était pas encore là. À midi un quart, je m’en allai et me fis conduire à Passy.

      Tout de suite, dans la ruelle, j’avisai les quatre gamins de l’ouvrier qui stationnaient devant la porte. Averti par eux, Me Valandier accourut à ma rencontre.

      «Eh bien, le capitaine Janniot? s’écria-t-il.

      – Il n’est pas ici?

      – Non.»

      Les groupes se pressaient autour du notaire.

      «Ils espèrent, me dit Me Valandier, et c’est ma faute.»

      Il m’interrogea, et je lui donnai, sur le capitaine, des indications quelque peu fantaisistes que les héritiers écoutaient en hochant la tête[137].

      Louise d’Ernemont murmura:

      «Et s’il ne vient pas?

      – Nous aurons toujours les cinq mille francs à nous partager,» dit le mendiant.

      À une heure et demie, les deux sœurs maigres s’assirent, prises de défaillance. Puis le gros monsieur à la jaquette malpropre eut une révolte subite contre le notaire.

      «Parfaitement, Maître Valandier, vous êtes responsable…»

      Il me regarda d’un œil mauvais[138].

      Mais l’aîné des gamins surgit à la porte en criant:

      «Voilà quelqu’un!.. Une motocyclette!..»

      Le bruit d’un moteur grondait par-delà le mur[139].

      «Mais ce n’est pas le capitaine Janniot, clama le notaire qui hésitait à le reconnaître.

      – Si, affirma Lupin en nous tendant la main, c’est le capitaine Janniot, seulement j’ai fait couper ma moustache… Maître Valandier, voici le reçu que vous avez signé.»

      Il saisit un des gamins par le bras et lui dit:

      «Cours à la station de voitures et ramène une automobile jusqu’à la rue Raynouard.»

      Il y eut des gestes de protestation. Le capitaine Janniot prononça:

      «Vous m’excuserez. Le rapide de Marseille a déraillé entre Dijon et Laroche. Il y a une douzaine de morts, et des blessés que j’ai dû secourir. Alors, dans le fourgon des bagages, j’ai trouvé cette motocyclette…»

      Il consulta sa montre.[140]

      «Eh! Eh! pas de temps à perdre.»

      Je le regardais avec une curiosité ardente. Lentement le capitaine Janniot se dirigea vers la gauche et s’approcha du cadran solaire. Il demanda:

      «Un couteau, s’il vous plaît?»

      Deux heures sonnèrent quelque part.[141] À cet instant précis[142], sur le cadran illuminé de soleil, l’ombre de la flèche se profilait suivant une cassure du marbre qui coupait le disque à peu près par le milieu[143].

      Le capitaine saisit le couteau qu’on lui tendait. Il l’ouvrit et il commença à gratter le mélange de terre, de mousse et de lichen qui remplissait l’étroite cassure.

      Tout de suite, à dix centimètres du bord, il s’arrêta, comme si son couteau eût rencontré un obstacle.

      «Tenez, Maître Valandier, voici toujours quelque chose.»

      C’était un diamant