Морис Леблан

Тайны Арсена Люпена. Уровень 1 / Les Confi dences d’Arsène Lupin


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La demoiselle au petit chien disparut.

      «Ça commence à devenir amusant,» ricana Lupin.

      Successivement débouchèrent deux dames âgées, maigres, qui se ressemblaient comme deux sœurs; puis un valet de chambre[118]; puis un caporal d’infanterie; puis un gros monsieur vêtu d’une jaquette malpropre; puis une famille d’ouvriers. Et chacun des nouveaux venus arrivait avec un panier rempli de provisions.

      «C’est un pique-nique,» m’écriai-je.

      Nous cherchions vainement un stratagème pour entrer, quand, tout à coup, la petite porte se rouvrit et livra passage[119] à l’un des enfants de l’ouvrier.

      Le gamin monta en courant jusqu’à la rue Raynouard. Quelques minutes après, il rapportait deux bouteilles d’eau. Lorsque l’enfant repoussa la porte, Lupin fit un bond[120] et planta la pointe de son couteau dans la gâche de la serrure[121].

      «Nous y sommes,» dit Lupin.

      Il entra franchement. Je suivis son exemple et je pus constater que, à dix mètres en arrière du mur, un massif de lauriers élevait comme un rideau qui nous permettait d’avancer sans être vus.

      Le spectacle qui s’offrit alors à mes yeux était si imprévu, que je ne pus retenir une exclamation, tandis que, de son côté, Lupin jurait entre ses dents:

      «Crebleu! celle-là est drôle!»

      Le même décor que sur le tableau! Le même décor!

      Il était alors une heure et demie. Le mendiant sortit sa pipe, ainsi que le gros monsieur. Les hommes se mirent à fumer près de la rotonde, et les femmes les rejoignirent. D’ailleurs, tous ces gens avaient l’air de se connaître.

      Ils se trouvaient assez loin de nous, de sorte que[122] nous n’entendions pas leurs paroles. Soudain il y eut une exclamation et, aussitôt, des cris de colère, et tous, hommes et femmes, ils s’élancèrent en désordre vers le puits.

      Un des gamins de l’ouvrier en surgissait à ce moment, attaché par la ceinture au crochet de fer qui termine la corde, et les trois autres gamins le remontaient en tournant la manivelle.

      Plus agile, le caporal se jeta sur lui, et, tout de suite, le valet de chambre et le gros monsieur l’agrippèrent, tandis que les mendiants et les sœurs maigres se battaient avec le ménage ouvrier.

      En quelques secondes, il ne restait plus à l’enfant que sa chemise.

      «Ils sont fous! murmurai-je.

      – Mais non, mais non, dit Lupin.»

      À la fin, Louise d’Ernemont qui, dès le début, s’était posée en conciliatrice, réussit à apaiser le tumulte. On s’assit de nouveau. Et du temps s’écoula. Chaque minute semblait les accabler d’une tristesse croissante.

      «Vont-ils coucher là?» prononçai-je avec ennui.

      Mais, vers cinq heures, le gros monsieur à l’eut un geste de désespoir, se leva et mit son chapeau.

      «Allons-nous-en, dit Lupin.

      – Vous croyez que la séance est finie?

      – Oui.»

      Nous partîmes sans encombre[123]. Lupin tourna sur sa gauche et, me laissant dehors, entra dans la première maison. Après avoir conversé quelques instants avec le concierge, il me rejoignit et nous arrêtâmes une automobile.

      «Rue de Turin, trente-quatre,» dit-il au chauffeur.

      Nous arrivâmes à une étude de notaire[124]. Lupin se présenta sous le nom du capitaine en retraite[125] Janniot. Il cherchait une maison selon ses goûts, et on lui avait parlé d’un terrain près de la rue Raynouard.

      «Mais ce terrain n’est pas à vendre! s’écria M. Valandier, le notaire.

      – Ah! on m’avait dit.

      – Nullement… nullement…»

      Le notaire se leva et prit dans une armoire un objet qu’il nous montra. Je fus confondu. C’était le même tableau que j’avais acheté, le même tableau qui se trouvait chez Louise d’Ernemont.

      «Il s’agit du terrain que représente cette toile, le clos d’Ernemont, comme on l’appelle?

      – Précisément.

      – Eh bien, reprit le notaire, ce clos faisait partie d’un grand jardin que possédait le fermier général d’Ernemont, exécuté sous la Terreur[126]. Tout ce qui pouvait être vendu, les héritiers le vendirent peu à peu. Mais ce dernier morceau est resté et restera dans l’indivision… à moins que…»

      Le notaire se mit à rire.

      «À moins que? interrogea Lupin.

      – Oh! c’est toute une histoire assez curieuse.»

      Et sans se faire prier, il commença.

      «Dès le début de la Révolution, Louis-Agrippa d’Ernemont, sous prétexte de[127] rejoindre sa femme qui vivait à Genève avec leur fille Pauline, ferma son hôtel et s’installa dans sa petite maison de Passy, où personne ne le connaissait, qu’une vieille servante dévouée. Mais on le trouva. Il eut arrêté. Son fils Charles aussi.

      – Cela se passait?… demanda Lupin.

      – Cela se passait le vingt-six germinal, an II, c’est-à-dire le…»

      M. Valandier s’interrompit, les yeux tournés vers le calendrier qui pendait au mur, et il s’écria:

      «Mais c’est justement aujourd’hui. Nous sommes le 15 avril, jour anniversaire de l’arrestation du fermier général.

      – Coïncidence bizarre, dit Lupin. Et cette arrestation eut, sans doute[128], étant donné l’époque, des suites graves?

      – Oh! fort graves, dit le notaire en riant. Trois mois après, au début de Thermidor, le fermier général montait sur l’échafaud. On oublia son fils Charles en prison, et leurs biens furent confisqués.

      – Des biens immenses, n’est-ce pas? fit Lupin.

      – Eh voilà! voilà précisément où les choses se compliquent. Ces biens qui, en effet, étaient immenses, demeurèrent introuvables.

      – Il restait tout au moins, dit Lupin, la maison de Passy.

      – La maison de Passy fut achetée à vil prix[129] par le délégué même de la Commune qui avait arrêté d’Ernemont, le citoyen Broquet. Le citoyen Broquet s’y enferma, barricada les portes, et lorsque Charles d’Ernemont, enfin libéré, se présenta, il le reçut à coups de fusil[130]. Le 12 février 1803, le citoyen Broquet vida les lieux[131], mais était fou!

      – Bigre! murmura Lupin. Et que devint-il?

      – Sa mère, et sa sœur Pauline étant mortes toutes deux, la vieille servante prit soin de lui[132]. Avant de mourir cette servante déclara que, au début de la Révolution, le fermier général avait transporté dans sa maison de Passy des sacs remplis d’or et d’argent, et que ces sacs avaient disparu quelques jours avant l’arrestation. Les trésors se trouvaient cachés dans le jardin. Comme preuve la servante montra trois tableaux, ou plutôt, car ils n’étaient pas encadrés, trois toiles que le fermier