nous masquer la forêt et sa beauté. Jamais nous n’avions regardé honnêtement l’aspect spirituel de la vie.
Dans nos témoignages individuels, vous trouverez beaucoup de façons d’aborder et de concevoir une Puissance supérieure à soi-même. L’approche ou la conception à laquelle nous donnons notre adhésion importe peu. L’expérience nous a enseigné que ce sont des questions qui ne devraient pas nous inquiéter dans l’optique qui nous intéresse. Il revient à chacun de régler ces questions lui-même.
Cependant, il est un point sur lequel ces hommes et ces femmes s’accordent de façon remarquable. Tous ont développé une foi en une Puissance supérieure à eux-mêmes et, depuis, croient en Elle. Dans tous les cas, cette Puissance a accompli le miracle, l’humainement impossible. Comme le disait un célèbre homme d’État américain, « Regardons le dossier ».
Des milliers d’hommes et de femmes, en chair et en os, affirment catégoriquement qu’après en être venus à croire en une Puissance supérieure à eux-mêmes, avoir adopté une certaine attitude envers cette Puissance et avoir accepté de se prêter à certaines choses simples, ils ont vu un changement spectaculaire s’opérer dans leur façon de vivre et de penser. Au bord du désespoir, de l’effondrement et de la faillite totale de leurs ressources humaines, ces gens se sont sentis envahis par un nouveau sentiment de force, de paix, de bonheur et de discernement. Ce changement s’est produit peu de temps après qu’ils ont eu rempli certaines exigences de bon cœur. Confus et déconcertés qu’ils étaient devant la futilité apparente de l’existence, ils ont vu les raisons profondes de leur difficulté de vivre. Mettant de côté la question de l’alcool, ils expliquent pourquoi leur vie était si insatisfaisante. Ils nous montrent comment le changement s’est produit en eux. Lorsque des centaines de gens peuvent affirmer que la conscience de la présence de Dieu est aujourd’hui ce qu’il y a de plus important dans leur vie, cela nous donne une puissante motivation de croire.
Le monde qui nous entoure a fait plus de progrès sur le plan matériel au cours du dernier siècle que pendant tous les millénaires précédents. Presque tout le monde en connaît la raison. Ceux qui s’intéressent à l’histoire ancienne nous disent qu’intellectuellement, les hommes de l’Antiquité étaient égaux aux plus grands esprits de notre temps. Pourtant, dans les temps anciens, le progrès matériel était d’une lenteur pénible. Le développement scientifique, l’esprit de recherche et d’invention étaient presque inconnus. À l’égard des éléments physiques, l’esprit des hommes était entravé par des superstitions, des traditions et toutes sortes d’idées arrêtées. Au temps de Christophe Colomb, plusieurs trouvaient insensé de croire que la terre était ronde. D’autres ont failli condamner à mort le savant Galilée pour ses hérésies en matière d’astronomie.
Nous nous sommes demandé : est-ce que certains d’entre nous n’étaient pas aussi bornés et irrationnels sur le plan spirituel que les gens de l’Antiquité l’avaient été dans le domaine matériel ? Même à notre siècle, les journaux américains ont hésité à publier un compte rendu du premier vol aérien par les frères Wright à Kitty Hawk. Toutes les tentatives précédentes pour voler n’avaient-elles pas échoué ? La machine volante du professeur Langley n’était-elle pas tombée au fond du Potomac ? Les meilleurs mathématiciens n’avaient-ils pas démontré que jamais l’homme ne pourrait voler ? Dieu n’avait-il pas dit que ce privilège appartenait aux oiseaux ? À peine trente ans plus tard, la conquête du ciel était presque devenue de l’histoire ancienne et l’aviation était en plein essor.
Dans la plupart des domaines, notre génération a été témoin d’une libération totale de la pensée. Montrez à un homme peu instruit un article du journal du dimanche où il est dit que l’on projette d’explorer la lune au moyen de fusées et il répondra : « Je parie qu’ils le feront, peut-être plus rapidement qu’on pen-se ». Notre époque n’est-elle pas caractérisée par la facilité avec laquelle nous remplaçons les idées anciennes par de nouvelles, par notre empressement à rejeter la théorie ou la chose qui ne fonctionne pas au profit de quelque chose de nouveau qui marche ?
Nous avons dû nous demander pourquoi nous n’adopterions pas ce même empressement à changer notre point de vue face à nos problèmes humains. Nous avions des difficultés dans nos relations personnelles, nous ne pouvions pas contrôler notre émotivité, nous étions en proie à la tristesse morbide et à la dépression, nous étions incapables de gagner notre vie, nous ne trouvions aucun but à l’existence, nous étions habités par la crainte, nous étions malheureux, nous ne croyions pas pouvoir faire quoi que ce soit pour les autres. Alors, n’était-il pas plus important de trouver un remède à long terme à nos frustrations que de regarder les documentaires sur les vols vers la lune ? Évidemment.
Lorsque nous en avons vu d’autres résoudre leurs problèmes simplement par leur confiance en l’Esprit de l’Univers, nous n’avons pas pu faire autrement que de ne plus douter de la puissance de Dieu. Nos idées ne menaient à rien. L’idée d’un Dieu fonctionnait.
C’est leur foi ingénue qui amena les frères Wright à croire qu’ils pourraient construire une machine volante. Et ils réussirent. Sans cette confiance, ils n’auraient rien accompli. Nous, agnostiques et athées, demeurions convaincus que l’autosuffisance réglerait nos problèmes. Lorsque d’autres nous ont montré qu’ils s’en étaient sortis par la puissance de Dieu, nous avons commencé à nous sentir comme ceux qui avaient prétendu que les frères Wright ne pourraient jamais voler.
La logique est une grande chose. Elle nous plaisait et nous plaît encore. Ce n’est pas un hasard si nous avons reçu la faculté de raisonner, de remettre en question les messages de nos sens et de tirer des conclusions. C’est là un des merveilleux attributs de l’homme. Nous, qui sommes enclins à l’agnosticisme, nous ne serions pas satisfaits d’une proposition qui ne se prête pas à une étude et à une interprétation rationnelles. C’est pourquoi nous éprouvons de la difficulté à expliquer pourquoi notre foi est rationnelle, pourquoi nous trouvons plus sain et plus logique de croire que de ne pas croire, et pourquoi nous disons que notre ancienne façon de penser était vague et sans consistance puisqu’elle nous menait au doute et nous forçait à conclure : « Nous ne savons pas. »
Lorsque nous sommes devenus alcooliques, brisés par un malheur auto-imposé impossible à retarder ou à éviter, nous avons dû courageusement faire face à un choix : ou Dieu est toute chose, ou Il n’est rien ; ou Dieu existe, ou Il n’existe pas. Quel serait ce choix ?
À ce stade de notre démarche, nous étions carrément en face de la question de la foi. Nous ne pouvions pas la contourner. Certains parmi nous étaient déjà bien engagés sur le Pont de la Raison, vers les rives souhaitées de la foi. La connaissance et la promesse d’un monde nouveau avait fait briller leurs yeux fatigués et redonné courage à leur cœur languissant. Des mains amies s’étaient tendues. Nous étions reconnaissants à la raison de nous avoir conduits jusque-là. Et pourtant, nous n’étions pas complètement arrivés. Sans doute nous étions-nous trop fiés à notre raison pour cette dernière étape et l’idée de perdre cet appui nous déplaisait.
Cette réaction était naturelle. Mais examinons la question de plus près. Sans que nous le sachions, n’était-ce pas une sorte de foi qui nous avait conduits là où nous étions ? N’avions-nous pas eu foi en notre propre raisonnement ? N’avions-nous pas eu confiance en notre faculté de penser ? Qu’était-ce cela, sinon une certaine foi ? Oui, nous avions cru, aveuglément cru, au Dieu de la Raison. Nous avons donc découvert que, d’une façon ou d’une autre, nous avions toujours été animés par la foi !
Nous avons également découvert que nous avions été des adorateurs. Combien cet état mental nous donnait la chair de poule ! N’avions-nous pas de diverses façons adoré des personnes, des objets, l’argent ou nous-mêmes ? Et puis, avec un motif plus noble, n’avions-nous pas admiré avec adoration un coucher de soleil, la mer ou une fleur ? Lequel parmi nous n’avait pas aimé quelque chose ou quelqu’un ? Quel rapport ces sentiments, ces amours, ces vénérations avaient-ils avec la raison pure ? Aucun ou bien peu, nous en prenions finalement conscience. Ces attitudes