François Villon

Œuvres complètes de François Villon


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si durement m'a chassé,

      Que j'en suys de joye interdict

      Et de tout plaisir déchassé,

      Je laisse mon coeur enchassé,

      Palle, piteux, mort et transy:

      Elle m'a ce mal pourchassé,

      Mais Dieu luy en face mercy!

      XI.

      Et à maistre Ythier, marchant,

      Auquel je me sens très tenu,

      Laisse mon branc d'acier tranchant,

      Et à maistre Jehan le Cornu,

      Qui est en gaige détenu

      Pour ung escot six solz montant;

      Je vueil, selon le contenu,

      Qu'on luy livre, en le racheptant.

      XII.

      Item, je laisse à Sainct-Amant

      Le Cheval Blanc avec la Mulle,

      Et à Blaru, mon dyamant

      Et l'Asne rayé qui reculle.

      Et le décret qui articulle:

      Omnis utriusque sexus,

      Contre la Carmeliste bulle,

      Laisse aux curez, pour mettre sus.

      XIII.

      Item, à Jehan Trouvé, bouchier,

      Laisse le mouton franc et tendre,

      Et ung tachon pour esmoucher

      Le boeuf couronné qu'on veult vendre,

      Et la vache qu'on ne peult prendre.

      Le vilain qui la trousse au col,

      S'il ne la rend, qu'on le puist pendre

      Ou estrangler d'un bon licol!

      XIV.

      Et à maistre Robert Vallée,

      Povre clergeon au Parlement,

      Qui ne tient ne mont ne vallée,

      J'ordonne principalement

      Qu'on luy baille legerement

      Mes brayes, estans aux trumellières,

      Pour coeffer plus honestement

      S'amye Jehanneton de Millières.

      XV.

      Pour ce qu'il est de lieu honeste,

      Fault qu'il soit myeulx recompensé,

      Car le Saint-Esprit l'admoneste.

      Ce obstant qu'il est insensé.

      Pour ce, je me suis pourpensé,

      Puysqu'il n'a sens mais qu'une aulmoire,

      De recouvrer sur Malpensé,

      Qu'on lui baille, l'Art de mémoire.

      XVI.

      Item plus, je assigne la vie

      Du dessusdict maistre Robert...

      Pour Dieu! n'y ayez point d'envie!

      Mes parens, vendez mon haubert,

      Et que l'argent, ou la pluspart,

      Soit employé, dedans ces Pasques,

      Pour achepter à ce poupart

      Une fenestre emprès Saint-Jacques.

      XVII.

      Derechief, je laisse en pur don

      Mes gands et ma hucque de soye

      A mon amy Jacques Cardon;

      Le gland aussi d'une saulsoye,

      Et tous les jours une grosse oye

      Et ung chappon de haulte gresse;

      Dix muys de vin blanc comme croye,

      Et deux procès, que trop n'engresse.

      XVIII.

      Item, je laisse à ce jeune homme,

      René de Montigny, troys chiens;

      Aussi à Jehan Raguyer, la somme

      De cent frans, prins sur tous mes biens;

      Mais quoy! Je n'y comprens en riens

      Ce que je pourray acquerir:

      On ne doit trop prendre des siens,

      Ne ses amis trop surquerir.

      XIX.

      Item, au seigneur de Grigny

      Laisse la garde de Nygon,

      Et six chiens plus qu'à Montigny,

      Vicestre, chastel et donjon;

      Et à ce malostru Changon,

      Moutonnier qui tient en procès,

      Laisse troys coups d'ung escourgon,

      Et coucher, paix et aise, en ceps.

      XX.

      Et à maistre Jacques Raguyer,

      Je laisse l'Abreuvoyr Popin,

      Pour ses paouvres seurs grafignier;

      Tousjours le choix d'ung bon lopin,

      Le trou de la Pomme de pin,

      Le doz aux rains, au feu la plante,

      Emmailloté en jacopin;

      Et qui vouldra planter, si plante.

      XXI.

      Item, à maistre Jehan Mautainct

      Et maistre Pierre Basannier,

      Le gré du Seigneur, qui attainct

      Troubles, forfaits, sans espargnier;

      Et à mon procureur Fournier,

      Bonnetz courts, chausses semellées,

      Taillées sur mon cordouennier,

      Pour porter durant ces gellées.

      XXII.

      Item, au chevalier du guet,

      Le heaulme luy establis;

      Et aux pietons qui vont d'aguet

      Tastonnant par ces establis,

      Je leur laisse deux beaulx rubis,

      La lenterne à la Pierre-au-Let.,

      Voire-mais, j'auray les Troys licts,

      S'ilz me meinent en Chastellet.

      XXIII.

      Item, à Perrenet Marchant,

      Qu'on dit le Bastard de la Barre,

      Pour ce qu'il est ung bon marchant,

      Luy laisse trois gluyons de feurre

      Pour estendre dessus la terre

      A faire l'amoureux mestier,

      Où il luy fauldra sa vie querre,

      Car il ne scet autre mestier.

      XXIV.

      Item, au Loup et à Chollet,

      Je laisse à la foys un canart,

      Prins