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An der Front und Hinter der Front - Au front et à l'arrière


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si fort en Grande-Bretagne en 1916. Et ils préparèrent une guerre économique totale, y compris avec sa prolongation après la guerre (contrôle du ravitaillement de l’Allemagne en matières premières, discrimination permanente contre le commerce allemand …)28.

      Cependant la stratégie de Berlin échoua ; elle ne fut d’ailleurs pas menée de façon cohérente : la défaite de la Russie ne fut pas vraiment exploitée pour ramener des troupes à l’Ouest, et la guerre sous-marine à outrance provoqua l’entrée en guerre des Etats-Unis.

      Deux innovations tactiques et opératives pour rétablir le mouvement

      Deux nouvelles méthodes apparurent en 1917/18 : elles transformèrent définitivement la nature de la conduite des opérations. Tout d’abord la méthode de pénétration tactique allemande : on contournerait les points de résistance pour les dépasser et les isoler, avec très peu de préparation d’artillerie, pour ne pas avertir l’ennemi et pour ne pas bouleverser le terrain, grâce à des armements très mobiles et puissants (Minenwerfer) et à des troupes d’élite (cela aboutit aux victoires allemandes de Riga contre les Russes en septembre 1917, et de Caporetto contre les Italiens en novembre 1917, et, en France, aux offensives de mars à juillet 1918). Mais ces offensives, en tout cas celles de 1918, furent menées à une échelle géographique telle que cette tactique se situait en fait au niveau opératif.

      La deuxième méthode fut la méthode mécanique (chars-camionsavions) des Alliés, à partir de la bataille de Cambrai, le 20 novembre 1917 : les chars anglais attaquèrent en masse (400 appareils) et percèrent sur neuf kilomètres. Malheureusement, on ne put pas exploiter cette percée, et trop d’engins furent détruits. Mais J. F. C. Fuller, chef d’état-major du Tank Corps, mit au point une première doctrine d’emploi des chars29. Cependant celle-ci n’intégrait pas encore tous les moyens mécaniques : cela restait encore trop strictement une percée de chars, sans liaisons organiques avec l’infanterie portée et l’artillerie.

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      Erich Ludendorff, général d’infanterie, premier quartier maître général (Erster Generalquartiermeister) et adjoint de Hindenburg au sein du troisième OHL (Oberste Heeresleitung ou Commandement suprême de l’armée de terre). (Library of Congress)

      Ce fut surtout en juillet 1918 que l’emploi des chars se montra décisif : on poussa droit devant, trop vite pour que l’ennemi pût se ressaisir, et l’aviation gêna l’arrivée des renforts allemands30. Foch avait bien compris cette révolution. Il expliqua que l’artillerie ne pouvait détruire que la première position de l’adversaire : elle devait remonter son dispositif pour frapper la deuxième position, pendant que l’ennemi préparerait une troisième position, et utiliserait les entonnoirs provoqués par l’artillerie pour y dissimuler des mitrailleuses. La solution serait « une attaque par tanks, la mitrailleuse blindée, et par avions mitrailleurs, la mitrailleuse volante »31.

      Cette nouvelle méthode permit de rétablir une stratégie mobile, avec l’emploi combiné des chars (les FT-17 Renault, plus légers et manœuvrables que les Mark IV britanniques), des camions, des avions.

      Notons néanmoins que la contre-attaque alliée, fin juillet, dans la région de Reims, alla trois fois plus lentement que l’offensive allemande de mai dans l’autre sens … Donc l’armement mécanique n’était pas encore l’alpha et l’oméga. Cependant on progressait : au printemps 1918, Fuller rédigea un « Plan 19 », qui était un projet de grande offensive blindée et motorisée pour le printemps 1919, projet qui annonçait vraiment la Deuxième Guerre mondiale et prolongeait les réflexions de Foch, auquel l’officier britannique soumit d’ailleurs son plan32. Et lors de la bataille d’Amiens, le 8 août 1918 (« Jour noir » de l’armée allemande !), l’armée britannique engagea avec grand succès douze bataillons de tanks (environ 400 machines)33.

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      Lieutenant-colonel Paul von Lettow-Vorbeck, commandant de la Schutztruppe (forces coloniales allemandes de tirailleurs) de l’Afrique orientale allemande. (Bundesarchiv Deutschland/Wikipedia Commons)

      Mon favori : Paul von Lettow-Vorbeck en Afrique orientale

      À mon avis, le chef le plus innovant sur le plan opératif fut Lettow-Vorbeck, en Afrique orientale. Il était très faible par rapport aux Alliés, mais il tint jusqu’après l’armistice ! Sa stratégie était d’attirer le plus possible de forces ennemies en Afrique, pour les diviser et réduire la pression sur l’armée allemande en Europe ; il ne recherchait pas une victoire décisive impossible. Mais ce n’était pas du Clausewitz. C’était en fait une variation sur la stratégie de la puissance tierce (développée pour la marine allemande par l’amiral Tirpitz avant 1914 : la Reichsmarine ne battrait pas la Royal Navy, mais pourrait le cas échéant l’affaiblir suffisamment pour la mettre en difficulté face à d’autres marines, ce qui rétablirait ainsi la dissuasion).

      Du point de vue opératif, il s’en prit aux centres logistiques et administratifs vitaux des adversaires, pas à leurs forces (car il n’en avait pas les moyens). Donc il comptait affaiblir l’ennemi par des coups stratégiques, non pas tactiques ; le tout avec une logistique très rustique et mobile34… Quelle fut l’influence à long terme de Lettow-Vorbeck ? C’est difficile à dire, mais à mon avis elle ne fut pas nulle. On la retrouve peut-être dans certains aspects les plus imaginatifs de la stratégie allemande pendant la Deuxième Guerre mondiale : l’offensive pour décharger un autre front, le combat évitant les forces adverses, la logistique très allégée, le « Rollender Kessel » ou « chaudron roulant », consistant, pour une unité, à battre en retraite en autonomie et sans liaison avec les voisins, sans ravitaillement, en cannibalisant les matériels ; tout cela évoque certains épisodes du front de l’Est, et aussi l’Afrikakorps (dont le cri de guerre, « Heia Safari ! » fut repris des troupes de Lettow-Vorbeck …).

      Conclusion

      En 1918, la victoire résulta de la combinaison des opérations offensives à l’Ouest et de l’entrée en action du front de Salonique, donc de la stratégie de mouvement et de la stratégie périphérique35. A plus long terme, la combinaison des deux innovations opératives (la pénétration par contournement des poches de résistance, comme à Riga, et la motorisation) déboucherait sur le Blitzkrieg de 1939/40.

      Et, à plus longue portée encore, on voit la naissance du niveau opératif, du point de vue de l’organisation, du commandement et de la stratégie36. Il embrasse tout un théâtre, il correspond aux dimensions de la guerre moderne, il est désormais le lieu géométrique du chef de guerre. Il permet d’autre part aux militaires d’espérer (en vain sans doute …) retrouver un minimum d’indépendance par rapport aux politiques (on pense ici tout de suite à Manstein et Joukov)37. Ce fut peut-être l’héritage stratégique le plus durable de la Première Guerre mondiale.

Stig Förster

      Einleitung

      Hundert Jahre nach dem Ausbruch des Ersten Weltkriegs ist eine Flut von Publikationen zu diesem Thema über das Publikum hinweggerollt. Zahlreiche wissenschaftliche Konferenzen, Gedenkveranstaltungen und eine intensive Berichterstattung in den Medien haben die Geschichte des Ersten Weltkriegs so intensiv durchleuchtet wie seit Jahrzehnten nicht mehr. Für manche Beobachter mag dieses Dauerfeuer ermüdend gewesen sein. Gleichwohl gab es doch viele interessante Aspekte und sogar neue Erkenntnisse im Hinblick auf diesen Krieg, seine Ursachen, seine Auswirkungen und seine Folgen. Auch methodisch hat die Wissenschaft die Forschungserträge der letzten Jahre zusammengetragen und dabei ein breit gefächertes Bild entwickelt, das die Kulturgeschichte, die Sozial- und Wirtschaftsgeschichte, die Alltagsgeschichte, die Gendergeschichte, die Medizingeschichte und andere mehr genauso ernst nimmt